Les anglais ont un terme intéressant : le coping.
Le coping est un terme utilisé en psychologie pour décrire tous les processus qui sont mis en place par l'inconscient d'un être humain afin de faire face à un traumatisme et de continuer à suivre le cours de sa vie normale.
Je n’avais jamais été voir la définition avant maintenant. Moi quand je me dis que je vais faire du coping. C’est que je vais agir sur des spirales dépressives pour les briser.
Le ménage
Par exemple… plus je déprime, plus mon espace de vie devient un dépotoir. D’ailleurs, quand j’étais plus jeune, c’était comme ça que je savais que je faisais une dépression.
Le souci c’est que plus mon espace de vie est un dépotoir et plus ça accentue la dépression.
Et plus je suis déprimé, moins j’ai de force pour faire le ménage…
C’est ce que j’appelle une spirale dépressive :
Quand je déprime, je ne fais plus le ménage
Quand je ne fais plus le ménage je déprime encore plus
Quand je déprime encore plus…
Alors, le but du coping c’est de venir casser cette spirale. Encore une fois : se bouger sans se brusquer.
Je reste délicat avec moi-même en me rappeler que mon manque d’énergie vitale pour faire le ménage est un symptôme de la dépression, tout en me rappelant que si j’abandonne je vais aggraver la dépression.
Ça passe parfois par ne rien faire pendant plusieurs jours en me concentrant mentalement pour choisir quand je vais le faire.
Allez, je me prépare mentalement, je vais faire le ménage mardi prochain… non plutôt mercredi… allez pour de vrai…
Ça passe parfois par faire immédiatement un petit acte de ménage.
Cet été, ça a été d’abord une période où je me suis mentalement répété que j’allais le faire puis un déploiement progressif : une pièce par pièce.
J’ai utilisé pour ça le protocole de KC Davis dans son livre :
Prendre soin de sa maison (même en plein KO): 31 jours d'autocompassion
On se sent facilement submergé à la vue d’un endroit en désordre. Prenez quelques minutes pour pratiquer l’autocompassion et respirer profondément.
Bien que vous puissiez avoir une impression d’énormité, il n’y a en fait que cinq choses dans une pièce : (1) les ordures, (2) la vaisselle, (3) le linge, (4) les choses qui ne sont pas rangées à leur place et (5) les choses qui n’ont aucune place attribuée.
1. La première étape consiste à prendre un sac-poubelle pour y mettre toutes les ordures. Empilez les choses volumineuses comme les boîtes et placez-les à côté du sac-poubelle. Ne sortez pas les poubelles.
2. Rassemblez ensuite toute la vaisselle et placez-la dans l’évier ou sur le plan de travail. Ne faites pas la vaisselle.
3. Prenez un panier à linge et ramassez tous les vêtements et chaussures. Mettez le panier à côté des poubelles. Ne faites pas la lessive.
4. Choisissez ensuite un endroit dans la pièce, comme un coin ou un bureau, et posez-y les objets qui ont leur place dans cette pièce. Puis formez une pile avec les objets qui n’ont pas de place attribuée. Passez à la pièce suivante et répétez la procédure jusqu’à ce que tous les éléments aient retrouvé leur emplacement.
5. Vous disposez désormais d’une pile de choses n’ayant pas de place attribuée. Maintenant que votre intérieur est plus net, il vous sera plus facile de vous attaquer à cette catégorie d’objets. Vous pouvez choisir de vous débarrasser de certains, sans place attribuée, qui entretiennent le désordre. Vous pouvez trouver un emplacement définitif aux choses importantes.
6. Sortez vos poubelles, mettez le linge sale dans la machine à laver ou la buanderie. Votre intérieur est maintenant habitable. Je garde toujours la vaisselle pour un autre jour.
La première fois que j’ai vu ce protocole, c’est l’une d’entre vous qui me l’a envoyé avec enthousiasme. Et je m’étais dit : okay cool mais je vois pas en quoi c’est révolutionnaire.
Bah là j’ai vu. En effet, en dépression je suis vraiment submergé face à la vue de l’espace en désordre. D’ailleurs l’autrice le précise avec justesse :
La méthode de rangement selon les cinq catégories aide votre cerveau à savoir précisément ce qu’il vise, au lieu d’avoir sous les yeux un désordre immense source de sidération. Il est ainsi capable de percevoir les différents éléments. Ignorer tout sauf telle catégorie vous aide à garder le cap sans vous laisser distraire. Vous avancerez plus vite en sachant ce que vous cherchez. Les ordures, le linge sale et la vaisselle sont placés dans leur propre conteneur.
Ainsi, vous ne passez pas un temps considérable à arpenter votre logement pour ranger les choses à leur place. Le rangement est alors plus rapide. Enfin, le fait de venir à bout d’une catégorie est une récompense vous apportant votre dose de dopamine.
Finies les heures de nettoyage sans voir de réels progrès. Notre cerveau a besoin de constater les progrès, sous peine de se décourager. Lorsque vous procédez par catégories, vous offrez à votre cerveau plusieurs lignes d’arrivée, dont le franchissement fait plaisir.
C’est vraiment ce dernier point qui m’a aidé. Le fait de pouvoir me féliciter plusieurs fois, de progresser de manière tangible.
La douche
Une des méthodes les plus connues de coping est la méditation. Si tu n’as jamais essayé je ne peux que t’encourager énormément. C’est beaucoup plus simple que ce qu’on s’imagine.
D’ailleurs, je me suis rendu compte en apprenant la méditation que je méditais à chaque douche. Et que c’était pour ça que j’avais énormément de mal à être de bonne humeur dans une journée sans douche.
Bon… clairement ce conseil n’est pas transposable. Je ne sais pas si ça aide beaucoup de monde de juste se doucher. Mais moi, vraiment, le fait de m’inciter à me doucher tous les jours va m’aider à rebooster un peu mon humeur.
Mais en tout cas ça fait partie d’une des spirales dépressives chez moi :
Quand je déprime je n’ai pas l’énergie d’aller me doucher
Quand je ne me douche pas je déprime encore plus
Quand je déprime encore plus…
La cuisine
Autre spirale dépressive : mon alimentation.
Quand je déprime je n’ai pas l’énergie de faire à manger
Quand je ne fais pas à manger je mange n’importe quoi en livraison et ça renforce ma dépression
Quand je déprime encore plus…
D’ailleurs, à l’été 2020 je ne me suis alimenté quasiment que de livraisons.
En plus ça déborde sur une autre spirale puisque ça fait plein de sacs de papier partout sur la table, qui déborde.
Alors je me suis fait des petites explorations. En m’aidant du livre Simplissime qui donne des recettes vraiment faciles à faire.
Je combinais cette démarche de faire la cuisine avec la démarche des missions que j’ai évoquée hier : par exemple faire une recette qui me demande d’aller chercher l’ingrédient dans une épicerie particulière de Paris, et donc qui m’oblige à faire une sortie.
Le sommeil
Cette spirale est particulière chez moi. Chez certaines personnes la dépression coupe le sommeil. Donc on va avoir :
Quand je déprime, je n’arrive plus à dormir
Quand je ne dors pas assez je déprime encore plus
Quand je déprime encore plus…
Mais moi c’est l’inverse : je dors énormément (mais sans jamais me sentir reposé).
Donc ça ressemble davantage à :
Quand je déprime, je dors énormément parce que je ne m’endors pas aux “bonnes heures”
Quand je ne m’endors pas aux bonnes heures, je n’ai pas un sommeil réparateur
Quand je n’ai pas un sommeil réparateur je déprime encore plus
Quand je déprime encore plus…
J’ai essayé de ne jamais lâcher cette guerre mais c’est celle qui a été le plus dur. J’ai eu l’impression de la perdre en permanence.
J’essayais de me forcer à me coucher pas trop tard.
Pour m’aider, j’ai utilisé un peu de mélatonine pour provoquer le sommeil quand j’en avais besoin.
Attention, la mélatonine peut entraîner une addiction, renseigne-toi correctement sur son utilisation avant.
Bon… c’était pas super concluant car je me réveillais au milieu de la nuit sans pouvoir me rendormir.
Mais j’ai pas lâché, pas lâché… pour au moins stagner et pas empirer la situation.
Trouve ta version
Encore une fois, je t’ai raconté ce qui a marché pour moi cet été. Ce n’est même pas ce qui marche pour moi tout court. C’est ce qui a marché pour moi, cet été 2024. Mais ce n’est absolument pas une recette universelle.
Ce qui est universel en revanche c’est ce concept de coping. Qu’est-ce que tu peux mettre en place ? Qu’est-ce qui peut t’aider ?
Avec toujours ce mantra : se bouger pour s’aider sans se brusquer
J'aime particulièrement cette série parce que le sujet me parle et aussi parce qu'elle apporte de la lumière sur une une maladie super courante et pourtant encore très mal comprise.
Pour la cuisine, mon petit hack perso c'est que quand j'arrive à cuisiner je fais une ou deux portions supplémentaires que je met en tupperware, comme ça dans les jours qui suivent si j'ai pas la force, je dégaine le tupp'. Ça me rend contente d'avoir anticipé et du coup quand je commande je culpabilise pas/moins parce que je sais que j'ai limité ça.
Merci Nico d'aborder ce sujet avec douceur en y mélangeant ton expérience personnelle, des explications médicales et des tips pour améliorer la qualité de vie pendant ce moment de crise.
Ce qui marche pour moi c’est de mettre un chronomètre d’une heure ou de 30 min en me disant peu importe ce que j’ai pu faire dans l’heure j’arrête à la fin du chrono… et aussi mettre de la musique avec un BPM élevé