Avant-hier je t’ai proposé un exercice issu d’un manuel célèbre de négociation :
Deux enfants se disputent une orange. Tu es leur parent. Comment tu t’y prendrais pour résoudre le conflit ?
On va en parler. Mais avant ça il faut qu’on aborde une notion : le gagnant-gagnant.
Un des pires obstacles à la négociation
Mon professeur de négociation arrêtait pas de “crier” sur nous à cause de ça. Et, à mon tour, quand j’ai enseigné la négociation à mes élèves je me suis retrouvé dans la même position.
Car, la plupart des gens ne savent pas ce que veut dire “gagnant-gagnant”. Ça fait partie de ces concepts qui sont devenus célèbres hors de leur discipline d’origine mais dont le sens est déformé au passage.
Pourquoi mon prof criait sur nous ? Parce que le scénario était toujours le même. On avait un élève A et un élève B qui négociaient. L’élève A roulait sur l’élève B. En lui extorquant tout. Et quand on demandait à l’élève B pourquoi il a laissé faire, il répond : je voulais un accord gagnant-gagnant.
Mais ça a quoi de gagnant-gagnant ?
Par exemple, l’élève A avait pour consigne de vendre un violon pour au moins 3000€ et l’élève B avait pour consigne de ne pas l’acheter plus de 20 000€.
Je leur demande le résultat et l’élève B m’annonce fièrement : je l’ai acheté à 19 000€.
Chaque fois je me dis quand il découvrira que l’autre pouvait le vendre à 3000 ça va le choquer.
Mais non !
Je révèle… et l’élève B me dit
de toutes façons c’est gagnant-gagnant car j’ai payé 1000€ de moins que mon maximum.
Mais…
pas…
du…
tout !
Ce n’est pas un gagnant-gagnant, c’est un gagnant-peureux.
Ce n’est pas parce qu’on a ce qu’on visait qu’on a gagné.
D’ailleurs, il n’est pas possible de faire de gagnant-gagnant dans cette configuration.
Dans cette configuration il y aura forcément ce qu’on appelle un compromis (sauf si l’un des deux arrive à son maximum). Or, le compromis c’est précisément ce qu’on appelle un perdant-perdant en négociation. Ce sont des synonymes stricts.
Dans cette configuration on peut avoir du
Gagnant/Perdant (Vente à 3000€)
Perdant / Gagnant (Vente à 20 000€)
Perdant / Perdant (tout compromis entre 3000 et 20 000€)
Mais du coup c’est quoi qu’on appelle le gagnant-gagnant ?
Bonne question. Revenons à notre histoire de l’orange.
Vous avez été beaucoup à proposer de couper l’orange en deux. Une moitié pour chaque enfant. Solution logique. C’est un compromis : chaque enfant perd une moitié de l’orange.
C’est du perdant-perdant mais c’est une solution. C’est parfois même la solution la plus juste. On partage.
D’autres m’ont proposé de trouver une deuxième orange et d’en donner une à chacun. Ici c’est encore un perdant-perdant. On a juste augmenté la taille du “gâteau”. En effet, chaque enfant voudra les deux oranges. En en prenant une, il en perd une.
Là encore il ne faut pas comprendre “avoir ce que l’on vise” et “gagner”.
L’une d’entre vous m’a fait une réponse très originale et riche.
Ici on ne joue pas sur la négociation. Puisqu’il n’y a aucune solution proposée. En revanche on joue sur la manière de communiquer. On optimise et on fluidifie la communication pour résoudre le conflit. C’est de la communication non-violente.
C’est très riche et ça permet de mettre dans les meilleures conditions pour la négociation. Apprendre les bases de la communication non-violente est d’une grande aide pour apprendre à mettre le bon état d’esprit avant de commencer.
Pour autant, ça n’est pas encore la négociation.
Mais, en même temps, il était impossible de décrire la négociation avec ce protocole parce que justement on demande les besoins aux deux parties. Et on les invite à voir s’il n’y a pas un besoin caché.
Et… effectivement dans l’anecdote de l’orange il y avait des besoins cachés : quand le parent demande aux deux enfants pourquoi ils veulent l’orange…
un enfant répond
pour faire du jus
et l’autre
pour faire un gâteau avec le zeste.
D’un coup, on a plus de souci : on peut donner toute la chair à un enfant et toute la peau à l’autre.
Dans ce cas très particulier (et très rare du coup) nous avons bien affaire à un gagnant-gagnant : chaque enfant a eu le maximum de ce qui comptait pour lui.
Mais, comme tu le vois avec cette illustration, ça n’est possible que rarement. Ça n’est possible que si une condition est réunie.
Est-ce que tu vois laquelle ?
Réfléchis quelques secondes avant de lire la suite.
La condition pour qu’il y ait un gagnant-gagnant possible
C’est bon ?
…
…
…
…
La condition obligatoire pour un gagnant-gagnant c’est que la négociation porte au moins sur deux variables. Dans le cas de l’orange on avait le zeste et la chair.
Sinon, ce n’est pas possible.
Si je veux te vendre un violon, tout l’argent que je prends c’est de l’argent que tu perds, et vice-versa : ça n’est pas possible de faire du gagnant-gagnant.
En revanche, si j’introduis une deuxième variable, par exemple le délai de paiement, ça peut devenir gagnant-gagnant.
Par exemple si je n’ai pas besoin de l’argent immédiatement, je peux te proposer de te le vendre à 20 000€ mais avec un paiement en 12 fois. Si toi tu as des soucis de trésorerie ça peut t’intéresser.
Ou, dans le cas d’une négociation salariale, ça peut-être d’avoir des congés en plus par exemple.
En tout cas il faut une (ou plusieurs) autre(s) variables de négociation.
S’il n’y a qu’une variable tu ne dois pas abandonner, tu dois lutter
Malheureusement, la plupart du temps, tu te retrouveras en situation de devoir gérer un compromis.
La plupart du temps on ne négocie même pas en information transparente. Dans le cas de l’orange c’est simple car chaque enfant voit l’orange. Mais souvent tu ne sais même pas ce que l’autre peut t’offrir.
Par conséquent couper la poire en deux est souvent une très mauvaise idée. En effet, tu ne sais pas si l’autre t’as donné suffisamment d’info pour faire ça de manière juste.
Dans le cas du violon, imagine que l’autre te dit qu’il ne peut absolument pas le vendre en dessous de 15 000€ (alors qu’il peut descendre jusqu’à 3 000€) et toi tu dis la vérité en disant que tu ne peux pas monter au-dessus de 20 000€… pourquoi ce serait juste de faire 17 500€ ?
La pratique de couper la poire en deux est une pratique de lassitude. On fait ça parce qu’on a peur d’éterniser la négociation. Mais le souci c’est que les gens connaissent cette pratique et s’adaptent en conséquence.
Et puis parfois c’est même carrément injuste. Par exemple si je négocie avec mon colocataire parce que je fais 100% des tâches ménagères et que lui il dit qu’il ne veut pas en faire plus de 30%… est-ce qu’on va couper la poire en deux entre 30 et 50% ?
Du coup il fait 40% et moi 60% ?
Bah non. Je veux qu’il fasse 50%, c’est tout.
De manière générale tu dois viser le meilleur de ce que l’autre personne peut te donner.
Mais pour ça il faut lutter un peu.
Comment le faire sereinement ?
Pourquoi on ne le fait pas ? Parce qu’on est mal à l’aise, qu’on a peur de le faire de manière violente.
Et bien c’est ici que réside tout le talent de négociation. Dans le fait de réussir à le faire calmement.
Réussir à dégager une énergie positive qui fait que même en réclamant une grande part du gâteau, la personne en face de nous nous respectera quand même.
Comment faire ?
C’est ce que je te propose dans ma nouvelle formation :
Comment négocier quand on déteste ça ?
Dedans je te parle justement des leviers émotionnels que tu dois maîtriser. Plutôt que de te parler, comme je viens de faire, des concepts rationnels comme celui du gagnant-gagnant.
D’ailleurs il est possible que tu restes émotionnellement incrédule. Je l’ai observé plein de fois. Même en expliquant la rationalité de l’impossibilité d’un gagnant gagnant quand le jeu est à somme nulle (une variable), certaines personnes vont continuer à défendre le fait que le mieux c’était le compromis.
Pourquoi ? Parce qu’elles ressentent que c’est ça qui est juste. C’est ça qui leur donne l’émotion de la justice. Et c’est tout à fait respectable et classique. Seulement il faut être conscient de ce biais en nous pour jouer avec. Et surtout afin qu’il ne soit pas retourné contre nous.
Y’a d’ailleurs un proverbe en négociation : quand une personne aguerrie en négociation vous propose de couper la poire en deux, c’est elle qui tient le couteau et c’est vous la poire.
La formation est accessible à son prix de lancement jusqu’à vendredi 23h59. Ensuite son prix doublera. Si tu la veux, c’est par ici :
https://nicolasgalita.podia.com/comment-negocier-quand-on-deteste-ca?coupon=NEGOEMOTION
(Si tu es premium ne clique pas sur ce lien. Va dans l’e-mail de mardi pour retrouver le tien)
Ayant fait la formation avec LEDR je connaissais la "bonne réponse" ;)
J'ai préféré ne pas vendre la mèche.