L’épisode précédent si tu l’as raté :
Le glissement de sens du mot
Au moment de la révolution, tout le monde comprenait bien qu’un régime représentatif n’était pas une démocratie. Alors, comment en sommes-nous arrivés là ?
Il semblerait que glissement du mot a eu lieu dans les années 1830–1840. On se serait mis à utiliser le mot “démocratie” comme un mot positif, pour désigner le régime représentatif et tromper le peuple. C’est ce glissement de sens qui a accouché de l’horreur sémantique : démocratie représentative. Dire “démocratie représentative” c’est comme dire “monter en bas”.
Le pire c’est qu’on a été tellement habitué à appeler le régime représentatif/l’aristocratie élective avec le nom de «démocratie» que nous ne sommes plus capables de penser la démocratie sans utiliser de pléonasmes. Démocratie directe par exemple. Ou démocratie participative.
Parler de “ démocratie directe” est l’échappatoire que nous avons trouvé. De la même manière que si vous naissiez dans un monde où «monter en bas» a pris le sens de «descendre», vous seriez obligé de dire «monter EN HAUT» pour désigner l’action de monter. En continuant cette métaphore voici à quoi ressemble le glissement des mots que nous connaissons.
Vous remarquerez au passage que le vrai mot qui devrait désigner le régime actuel (aristocratie) a été diabolisé et évacué de telle sorte qu’il est sorti du vocabulaire fréquent. Car la manipulation des mots demande de remplacer “descendre” par “monter en bas”. Les deux ne pouvant pas cohabiter sans qu’on se rende compte de la supercherie.
Pièces à conviction
S’il fallait encore des preuves que nous ne sommes pas en démocratie il vous suffit de regarder l’histoire récente.
Le référendum de 2005
En 2005, les français rejettent à 55% le traité européen. Deux ans plus tard, il est voté à 80% par le parlement, sans consultation du peuple. En démocratie ce serait impossible.
La fragilité de l’équilibre
On l’a vu dans les années 30, un régime représentatif peut basculer à tout instant dans la dictature. Ce qui est normal puisque, comme nous venons de le voir, c’est un système qui a été conçu pour être une voie entre la dictature et la démocratie.
Les dictatures ont aussi des élections
D’ailleurs, vous avez actuellement beaucoup de dictatures où vous avez des élections. Par contre vous n’avez aucune dictature où le peuple rédige les lois. Parce que l’élection n’est en rien le fondement d’un système démocratique.
Les promesses non-tenues
On ne s’éternisera pas là-dessus tellement le sujet a été vu et revu. Les périodes électorales sont truffées de mensonges. Et ce n’est même pas la faute des candidats, c’est structurel : il faut mentir pour remporter l’élection.
Conclusion
Nous ne sommes donc pas en démocratie. Nous sommes évidemment dans un état de droit et une République mais nous ne sommes pas en démocratie.Selon votre degré d’adhésion au régime vous pouvez l’appeler, “régime représentatif”, “aristocratie élective”, “oligarchie élective” ou en étant vraiment dur : “ploutocratie”.
La démocratie n’a jamais utilisé l’élection, elle utilise le vote. Et pour désigner l’assemblée qui rédige les lois (car il faut bien un nombre limité), elle a toujours utilisé le tirage au sort. Mais c’est encore un autre sujet.