Plus tôt dans la semaine je vous ai proposé de me poser des questions autour du sujet des émeutes, des crimes policiers, du racisme…
Aujourd’hui j’essaie de vous répondre !
La non-violence est un mythe pour maintenir le statu quo
Pourquoi répondre à la violence par la violence ? Ce n’est pourtant pas le genre d’éducation souhaitée à notre siècle ?
Pour le coup cette question est un classique. Alors que pourtant, c’est bien par la violence que s’exerce le pouvoir.
Avant, les gens qui avaient la plus grande force physique dirigeait. Mais, très vite, on a trouvé des organisations où la force physique se met au service d’une institution qui dirige.
Pour diriger, il faut contrôler les gens qui sont les meilleurs en violence. De nos jours ce sont les policiers et les militaires.
La réforme des retraites est passée parce que le gouvernement peut envoyer la police réprimer.
Une fois qu’on a compris ça, on comprend pourquoi énormément de luttes n’ont abouties que par la violence.
Sans mouvement violent, les Noirs américains n’auraient probablement jamais obtenu les avancées des années 60.
De même, on dit souvent que le mouvement féministe est le seul mouvement non-violent qui ait obtenu des choses. C’est faux. Au Royaume-Uni, les suffragettes ont posé des bombes. Plein de bombes :
Les suffragettes britanniques ont surtout eu recours aux attaques à la bombe à partir de 1912, en ciblant notamment des lieux touristiques et des églises dont la Tour de Londres, l'abbaye de Westminster, la cathédrale Saint-Paul, la Banque d'Angleterre, causant notamment des dommages à des pièces exposées au British Museum et à la National Gallery.
En 1913, la militante Emily Davison fait sauter une bombe au domicile du chancelier David Lloyd George.
Elles ont obtenu le droit de vote des femmes en 1918. Au lieu de 1945 en France.
L’autre point à avoir en tête c’est la manipulation du pacifisme. Souvent, le groupe dominant appelle à la non-violence afin de garder le pouvoir. C’est un stratagème vieux comme le pouvoir.
Quand le groupe dominant est violent, c’est légitime. Quand les oppositions sont violentes : elles sont criminelles.
Dans une lutte on a souvent un groupe dominant, un groupe passif et un groupe qui veut changer les choses. Et c’est à ce groupe passif qu’on fait ce coup qui marche super bien.
Et on ne le fait pas que pour la violence physique d’ailleurs :
Les grévistes de la SNCF vous prennent en otage !!!
Tout moyen de l’opposition est dénoncé comme étant le mauvais. Ce ne sera jamais le bon moyen.
Là où cette tactique est diablement efficace c’est qu’elle peut fonctionner tout en donnant un air de neutralité. Ainsi les médias qui vont s’interroger sur la violence des émeutes au lieu de tourner en boucle sur le problème d’un meurtre commis par un policier.
Dans Rules for Radicals, l’auteur décrit ce phénomène avec plusieurs règles :
Règle 1 :
Moins une personne aura d’intérêt personnel dans un sujet et plus elle va s’interroger sur l’éthique des moyens utilisés. (…) Corollaire : une personne va être d’autant plus concernée par l’éthique du moyen qu’elle est à distance de la scène de conflit.
En d’autres termes, ce sont les personnes qui sont loin du combat qui vont passer leur temps à se demander si c’était la bonne manière de faire, si on est pas en train de desservir la cause. C’est exactement ce qu’on observe avec les émeutes.
Règle 5 :
Plus une personne a des moyens à sa disposition et plus elle va s’inquiéter de l’éthique de ces moyens. Moins une personne a de moyens à sa disposition et moins elle va se préoccuper de l’éthique de ces moyens.
Règle 9 :
Tout moyen efficace va automatiquement être jugé immoral par l’opposition.
Une des raisons pour laquelle la violence des dominés est à ce point décriée c’est tout simplement parce qu’elle est efficace.
Et si les policiers faisaient pareil ?
Et si c’était les flics qui se comportaient ainsi en réponse-réaction à la violence de la situation ? (c’est pas le cas, c’est eux qui ont commencé)
Si jamais tu vois une femme frapper son partenaire deux fois plus grand et lourd qu’elle sous le coup de l’énervement… tu pourrais condamner, tu pourrais comprendre…
Mais est-ce que tu dirais et si c’était lui qui la frappait ?
Bah si c’était lui qui la frappait j’espère qu’il irait en prison ? C’est quoi cette question ? Y’a pas de symétrie.
Sans compter que, là, c’est le métier de la police que de gérer la violence !
Ils ne sont pas bénévoles : non seulement on les paie pour ça mais c’est aussi pour ça que ce sont les seules (quasiment) personnes autorisées à se servir d’armes à feu dans un espace public.
Avec cette autorisation vient une responsabilité.
Si un enfant fait caca dans la chambre de ses parents, tu dirais pas et si le parent faisait caca dans la chambre de l’enfant ?
Au passage… quand une police commence à faire ça dans des pays non blancs, on crie ici à la dictature. Et, parfois, ON ENVOIE NOTRE ARMEE.
Donc bon…
Mais les parents ?
Quelle est la responsabilité des parents dans ces émeutes ?
C’est une question si étrange. Elle vient probablement d’un impensé raciste du sauvage. Je remarque que quand un jeune d’extrême-droite commet une dégradation voire blesse quelqu’un on ne demande jamais quelle est la responsabilité de ses parents.
Sans compter que dans les quartiers en question les parents ont souvent énormément de difficulté. Les parents en question ce sont eux qui ont bravé le covid pendant que nous on était confiné·es.
Combien de ces parents sont morts pendant l’épidémie ?
Combien cumulent deux métiers ?
Combien croulent sous les problèmes économiques ?
La civilisation, monsieur
Est-ce “civilisé” de brûler une école ? (rapport au débat sur la décivilisation)
Avons-nous un exemple de ce terme qui soit autre chose que le summum de la pensée raciste ?
Qui est la civilisation ? L’Europe ? Les massacres des amérindiens c’était civilisé ? La traite négrière ? La colonisation ?
Ah oui pardon la colonisation c’était justement pour apporter la civilisation aux sauvages.
D’ailleurs, le mot décivilisation vient de l’extrême-droite. Ce n’est pas un hasard.
Mais si je reformule la question en pourquoi les écoles brûlent alors que ça devrait être un sanctuaire ?
Alors j’ai répondu avant-hier :
Les cités ne sont-elles pas des endroits de barbarie ?
Imaginons qu’un flic soit honnête, pas facho, bienveillant et de gauche, je suppose qu’ajd il se ferait quand même “agresser” par les gars des cités, car désormais la haine est dans les 2 camps, donc de façon tout à fait empirique, les flics se font emmerder par des noirs et des arabes parce que ceux ci les détestent, ils ont raison de les détester, mais comment en sortir ? C’est un peu le conflit israelo palestinien
Alors là… je suis scié. Désolé pour la personne qui a posé la question mais c’est juste n’importe quoi ?
Les cités c’est pas une jungle : l’immense majorité des habitant·es sont pacifiques.
Mais même la minorité qui répond par la violence… elle répond.
Tu parles du conflit israelo-palestinien, mais si tu ne vois pas qu’il existe un état dominant et un “état” dominé… je ne peux rien faire.
Comment organiser les émeutes ?
Comment organiser et canaliser la colère et la violence des émeutiers vers des cibles plus légitimes (QG de fachos, domiciles de Zemmour, Darmanin, responsables de bavures policières, ou tout aussi coupables ceux qui les enterrent/couvrent …) et non pas brûler des écoles et des véhicules dans leur propre quartier, précarisant encore plus leur environnement déjà un peu abandonné par l’Etat.
C’est une excellente question. Pour y répondre il faut d’abord comprendre la différence entre émeute et révolte.
L’émeute, comme nous le disait Martin Luther King est le langage de ceux qu’on entend pas. C’est une auto-destruction.
Parce que les jeunes émeutiers savent que le jour où ils franchissent le périph c’est fini pour eux.
Ils ne vont pas attaquer le domicile de Darmanin ou de Zemmour car ils n’en ont pas les moyens opérationnels.
Qui viendrait canaliser ça ?
Il faut arrêter de parler de “bavures policières”
(Par contre, désolé, mais le terme “bavure” pour qualifier les meurtres et les violences policières, c’est non. C’est euphémiser le problème. On ne peut pas ébavurer la police comme on ébavure une pièce de métal découpé).
Je suis entièrement d’accord et je m’excuse pour l’emploi du mot dans le document. Je l’ai utilisé parce que je voulais que les gens les plus “centristes” puissent s’y reconnaître. Là où crime policier aurait pu braquer.
Mais j’ai eu tort.
Tu as raison, il faut qu’on arrête de dire que ce sont des bavures. Et d’ailleurs merci pour le petit cours d’étymologie sur les bavures et le métal : j’étais persuadé que le mot bavure venait tout simplement du verbe baver.
A suivre…
Il reste encore beaucoup de questions. Donc je prendrais la suite la semaine prochaine.
D’ici là, bon weekend !
Encore un super article. Merci ! Depuis enfant le mot bavure me laisse pantoise. Ce sont les bébés ou les escargots qui bavent. C’est sans commune mesure avec les violences policières.