En vrai, j’ai pas compté. Je sais pas exactement. Mais avec un rythme de 2-3 dépressions par an entre 2018 et 2024, ça doit être dans ces eaux là.
Voici 16 conseils que je me donnerais à moi-même. En espérant que ça puisse aider quelqu’un.
1 - Identifier
L’urgence c’est de savoir reconnaître la dépression chez toi. Bien sûr y’a la liste officielle des traits du DSM, mais tu auras probablement des choses plus spécifiques.
Par exemple, moi, je commence à comprendre quand je suis en dépression quand ma voix interne devient très négative.
Mieux encore : tu as des gens qui te connaissent et qui te disent que tu es en dépression
2 - Accepter
J’ai toujours un laps de temps entre le moment où je me dis que je suis en dépression et le moment où je l’accepte vraiment. Avec le temps j’ai appris à le diminuer. Généralement quand on se demande si on est en dépression c’est qu’on l’est déjà depuis un moment. Et au pire si tu t’inquiètes trop tôt... t’auras la bonne nouvelle de finalement pas l’être.
Mais surtout, plus vite tu l’acceptes, plus tu interviens tôt et plus la dépression sera courte.
3 - Notifier
Dis-le le plus rapidement possible aux personnes de confiance qui pourront aider. Notamment pour la phase suivante.
4 - Alléger
Ton esprit a un rhume, un covid, tu dois donc le ménager. Si c’est possible, prends un arrêt maladie au travail. Si c’est possible demande aux personnes qui vivent avec toi de prendre davantage de charge ménagère (surtout si tu n’es pas un homme cis).
De manière générale, tu n’es plus en état d’avoir autant d’obligations que d’habitude.
Je vois trop de personnes déprimées rentrer dans une spirale extrêmement toxique : elles continuent de s’imposer leur niveau habituel de responsabilités. Puis y’a deux cas de figure. Le premier c’est qu’elles les tiennent dans une souffrance énorme qui aggrave la dépression. Le deuxième c’est qu’elles finissent par faire une erreur due à leur état et se font engueuler ... ce qui en retour aggrave la culpabilité et donc leur état.
5 - Ne pas culpabiliser
La culpabilité est un amplificateur de dépression. Essaie de te foutre un peu la paix à toi-même.
Avoir une période où tu t’observes avec indulgence est une bonne idée. Une très bonne idée.
6 - Choisir un pôle
On l’a vu, y’a 5 pôles touchés par la dépression. Ton but ça va être d’en réactiver un à la fois. Dans la mesure de tes capacités.
Les 5 pôles sont dans le guide d’autosoin de la dépression : physiologie, activité, émotions, pensées et situation.
Choisis celui qui te paraît le plus facile à relancer et tente de faire un massage cardiaque à ton esprit en partant de là.
Ma dernière dépression j’ai réussi à relancer le système en faisant du vélo tous les jours au bord de l’eau, par exemple.
7 - Déployer un système de maintenance de la vie d’adulte
En vrai ça va avant. C’est même prioritaire. T’assurer d’avoir un système de maintenance pour la vie d’adulte.
Par exemple j’ai mon stock de repas facile à faire. Ou encore des techniques pour quand même réussir à faire le ménage.
Mieux encore : j’avais réussi à faire des taches ménagères ma mission de la journée. Au début c’était que ça : je me mettais comme mission de faire la vaisselle demain.
Et je sortais de mon lit juste pour ça. C’était déjà une victoire.
Mais… là aussi il faut réévaluer tes exigences. Si tu n’as plus la force de faire la vaisselle et bien tu pourrais acheter des couverts en carton. Okay d’habitude tu ne le fais pas car c’est pas écologique, mais tu remonteras ton niveau d’exigence après la dépression.
8 - Faire une activité physique
Je sais. On le dit tout le temps. Mais c’est parce que ça peut marcher. Ça marche pas tout le temps mais ça peut.
Mais choisis une activité que tu aimes. Ça sert à rien dans te lancer dans une autre source de souffrance.
D’ailleurs on sous-estime le pouvoir de la marche. Si marcher 2 heures est plus facile pour toi que de faire 30 minutes d’un sport plus intensif et bah marche 2 heures.
Si c’est juste 10 minutes à sauter sur place dans ta chambre c’est okay aussi.
Ne te mets pas trop la pression : si tu es dans un état où faire du sport est trop compliqué accepte sans te juger.
D’autant plus que se mettre intensément au sport puis arrêter brutalement peut aggraver la dépression, ça m’est arrivé au moins 2 fois.
9 - Voir un•e pro
Demande de l’aide pour réserver un RDV. Tu peux même demander à ce qu’on t’accompagne. Malgré toutes mes catastrophes avec les psys je continue de recommander cette solution PENDANT LA DÉPRESSION.
En plus maintenant t’as des plateformes où tu peux trouver des psys en visio. Je tapais « psy TCC visio » pour ne pas avoir de psychanalyste et c’était cool. Une séance ponctuelle peut suffire à t’aider.
J’aime aussi la visio car elle ne me donne pas l’impression que je suis ensuite obligé de m’engager sur le long terme. Une fois c’est okay aussi.
10 - Prendre des médicaments
Il ne faut ni fantasmer, ni diaboliser les médicaments. Parfois c’est la seule solution pour t’en sortir.
Ton médecin généraliste peut t’en prescrire mais attends toi à ce qu’il refuse. Tu ne seras probablement pas en état de lui rappeler qu’il n’a pas le droit de refuser en bloc.
Autre point important : il y a énormément de molécules différentes. Donc en général on en teste une pendant environ 3 semaines et ensuite on voit.
Si ça marche pas on change. Si ça marche mais que les effets secondaires sont trop handicapants on change. Il y a tellement de molécules différentes que c’est vraiment un jeu d’ajustement.
Attention : les antidépresseurs ont le pire effet secondaires du monde. En effet, ils peuvent accentuer les pensées suicidaires au début ! Le comble !
Idem, les arrêter brutalement peut déclencher une crise suicidaire et d’autres effets secondaires flippants.
Mais si tu arrêtes brutalement : ne culpabilise pas. Tu as fait de ton mieux. Plein de gens arrêtent brutalement pour plein de raisons. Une personne déprimée a plus de mal à tenir une ligne de discipline. C’est NORMAL.
11 - Dormir
Malheureusement la perte de sommeil et/ou le sommeil non réparateur est une cause ET une conséquence de la dépression.
J’ai pas trouvé de formule magique si ce n’est la mélatonine. Ça se trouve en pharmacie et c’est utilisé également quand tu fais un décalage horaire en retour de voyage.
Ça m’a indéniablement aidé MAIS c’est un coup de pouce très léger. Faut pas s’attendre à un somnifère.
En gros ça provoque la sensation d’avoir envie de dormir. Mais la fenêtre de tir est courte. Donc si tu continues à regarder des écrans tu la rates. Il faut réussir à avoir la discipline de fermer les yeux à rien faire en attendant.
Sans compter que ça n’aide absolument pas à rester endormi•e donc si tu te réveilles au milieu de la nuit faut en reprendre.
Disons que j’ai davantage réussi à agir sur le pilier sommeil en prévention qu’en guérison. C’est-à-dire en m’empêchant de tomber dans la spirale. Mais je n’ai pas vraiment trouvé la formule pour en sortir.
12 - Ne pas se suicider
Je ne sais pas si c’est transposable à une autre personne mais j’ai ce que j’appelle mon logiciel anti-suicide.
C’est une suite de phrases que je me répète quand la crise suicidaire monte. Je négocie avec moi-même en disant que je comprends mon envie de mourir. Que si la vie c’est toujours comme ça, ça sert à rien MAIS qu’un jour ça s’arrête. Et ce jour là je serai content d’être encore là.
Et quand ça va vraiment mal j’arrive à utiliser la procrastination contre moi-même. En me disant que j’y repenserai demain. Puis demain. Puis demain. Et ainsi de suit.
13 - Parler à des gens qui savent ce que c’est
Parler de la dépression a une légère vertu thérapeutique. Mais faut avoir de bonnes oreilles. Si tu parles de dépression à une personne qui te fait culpabiliser ou même ne comprend rien, ça peut te rajouter un énorme fardeau.
14 - Écrire
Je triche. J’y suis jamais arrivé. Moi j’arrive plutôt à lire. Me plonger dans des livres qui m’enthousiasment.
Mais je sais que les gens qui arrivent à pratiquer le journaling pendant les dépressions y trouvent du réconfort.
15 - Revenir à la surface
Je ne pense pas que ça soit universel mais mes sortie de dépression sont généralement très brutales. Et souvent après un épisode où je touche le fond. Par exemple l’an dernier je me suis retrouvé couché sur le sol, paralysé par une douleur énorme au dos. Pendant quasiment une heure.
Et trois jours après tout était fini.
La sensation de sortir de dépression est si magique. Ça donne vraiment un goût incroyable à la vie juste normale.
Ça vaut évidemment pas le coup d’aller en dépression pour ça. Mais ça serait dingue de pouvoir en permanence savourer à ce point.
16 - Chercher la cause
Il n’y a pas toujours de cause facile à identifier. Mais si tu la trouves ça vaut le coup.
Ça te permet de savoir comment éviter d’y retomber ou au moins d’anticiper.
Moi, tu le sais, j’ai fini par découvrir que la cause c’était le burn-out autistique. Et depuis j’en ai plus fait. Même si c’est encore trop tôt pour crier victoire ... c’est vraiment dingue.
Parce que connaître la cause permet de supprimer ou au moins diminuer les déclencheurs dans sa vie. Ça redonne le pouvoir.
Mais j’insiste : y’a pas toujours de cause. Ou parfois la cause c’est juste la chimie de ton cerveau. Ce n’est pas quelque chose sur lequel tu peux agir.
Je ne veux pas que mon témoignage devienne une nouvelle injonction culpabilisante mais davantage une piste à explorer si tu te reconnais dans le burn-out autistique.