5 réponses sur les HPI
Merci pour votre participation au sondage d’hier, il est temps de débriefer !
R1 | Un HPI est une personne avec un QI supérieur à 130
Wikipédia a choisi de nommer la page : Surdoué.
C’était en effet le terme qui était le plus répandu quand j’étais enfant. La définition est simple : une personne dotée d’une intelligence significativement supérieure à la moyenne. Or, l’outil imparfait et critiquable pour mesurer l’intelligence en psychologie c’est le QI.
Il faudrait une semaine entière pour critiquer le QI et son origine eugéniste/raciste. Pour autant, c’est l’outil psychométrique le moins pire qu’on a pour ça. Les autres font encore moins bien.
La définition retenue par le consensus scientifique est donc : une personne dotée d’un QI qui la place dans les 2% les plus haut.
Ou, pour le dire autrement : une personne plus intelligente que 98% des gens.
Une personne sur cinquante, donc.
Par construction du QI, ça équivaut à un QI de 130.
Tu noteras que ça veut dire qu’il ne peut pas y avoir d’explosion de HPI. Là où c’est possible pour les autistes ou TDAH car ça veut juste dire qu’on les identifie mieux, la définition même de HPI force leur nombre : iels seront toujours 2%, ni plus ni moins.
Que ce soit HQI, HPI, Surdoué·e, Gifted ou Précoce, il s’agit exactement de la même notion. Sauf que HQI c’est la formulation pour éviter toute confusion.
Parce que le mot HPI a été infecté (on en reparlera), que le mot surdoué·e laisse l’impression qu’on peut avoir trop d’intelligence, que le mot Gifted est bien mais utilisé dans les pays anglophones et que précoce renvoie à la définition ancienne du QI. En effet, à la base, le QI servait à déterminer l’âge mental d’un enfant.
Le QI était au début, comme son nom l’indique, un quotient donc une division. On divisait l’âge mental et le vrai âge.
Par exemple, imaginons un enfant de 10 ans qui a les performances scolaires qu’on attend normalement à 12 ans. Et bien cet enfant aura un âge mental de 12 ans et un QI de 120 (12/10 puis multiplié par 100).
Or, ça fait longtemps que le QI ne désigne plus ça.
Quant au mot Zèbre… c’est un mot qui a été proposé par l’autrice de l’horrible livre Trop intelligent pour être heureux ?
Techniquement c’est pareil. Mais on le voit beaucoup utilisé pour désigner des gens atypiques que ça soit intellectuellement ou émotionnellement.
R2 | Les enfants HPI ne sont PAS en échec scolaire
On a pris 16 000 élèves français en 2007, on a mesuré leur QI au début de l’année. Puis on a observé leur note au brevet. Résultat ? On observe un lien direct entre QI et note au brevet. Plus le QI est haut plus l’enfant a une chance d’avoir une bonne note au brevet. Avec en moyenne 2,6 points de plus que les autres.1
Encore plus marquant : sur les 320 élèves au QI supérieur à 130 seul un a eu en dessous de la moyenne. Alors que des milliers parmi les élèves au QI inférieur à 130 ont eu moins de la moyenne.
Ça contredit totalement le chiffre bidon et circulant pourtant énormément du un tiers-un tiers-un tiers. L’idée selon laquelle parmi les HPI on aurait un tiers d’excellents élèves, un tiers de moyens et un tiers d’élèves en grande difficulté.
On a même des gens qui affirment que : Il est établi que la moitié des Enfants Intellectuellement Précoces (EIP) présente des difficultés scolaires, tandis que le tiers d’entre eux n’atteindra pas le lycée2
C’est tout simplement faux.
Maintenant on pourrait dire : ok mais là dans l’étude sur le brevet on a 80% des HQI qui ne le savaient pas. Il y avait donc 20% d’élèves qui étaient '“diagnostiqués” HPI. Peut-être que les élèves diagnostiqués sont précisément ceux qui ont des difficultés.
Ce serait déjà beaucoup plus crédible. Autant j’ai toujours trouvé ça absurde l’idée que les élèves au plus haut QI aient plus de difficultés à l’école, autant ce biais d’échantillonnage est possible.
Mais là encore… c’est raté.
Parmi les enfants diagnostiqués HPI on observe moins de redoublement, davantage de sauts de classe. Et quand on sonde les parents, ils sont 93% à déclarer que leur enfant n’a aucune difficulté à l'école !
Donc ici la réponse était bien non les enfants HPI ne sont pas plus souvent en échec scolaire que les autres.
C’est d’ailleurs une évidence puisque le QI a été créé précisément à l’origine pour mesurer la performance scolaire. Un haut QI c’est par définition une personne performante à l’école.
Vous avez été 49% à trouver la bonne réponse ! Ce qui fait de vous la plus grosse minorité derrière les gens qui ont répondu on ne sait pas (21%).
Après je me dis que vous m’avez vu venir puisque vous n’avez été que 11% à répondre que les HPI, diagnostiqué·es ou non, étaient en difficultés scolaires.
Il est important de réaliser que, dans un pays comme la France où les tests de QI ne sont pas administrés de manière systématique à toute la population, et où leur usage est réservé aux psychologues diplômés, la plupart des gens ne passeront jamais un test de QI de leur vie, et ne connaîtront donc jamais leur score, y compris s’il est supérieur à 130.
Par conséquent, la plupart des surdoués n’ont jamais passé un test de QI, et sont donc des surdoués qui s’ignorent. Ce sont les surdoués « ordinaires », ceux qui généralement réussissent brillamment scolairement et professionnellement, et qui, s’ils font parler d’eux, ne le font jamais en tant que surdoués puisqu’ils n’ont jamais passé de test et n’ont jamais été identifiés comme tels. Ceux-là sont ignorés des psys, des associations, des sites internet, des livres spécialisés et du discours médiatique sur les surdoués.3
R3 | Les HQI sont plus heureux et ont une meilleure santé mentale
Aïe. Là pour le coup vous avez été la moitié à répondre que les personnes avec un QI supérieur à 130 ont davantage de problèmes de santé mentale.
Là encore, c’est un mythe répandu notamment par le livre au titre absurde Trop intelligent pour être heureux ?
Ça correspond également avec le fantasme de l’imbécile heureux : ah si j’étais plus bête je me poserai moins de questions.
Alors certes, mais se poser des questions ne rend pas malheureux. C’est bien de ne pas se mettre en danger, de faire des études plus longues et d’être capable de lire des livres sur le bien-être.
D’autant plus que le QI mesure une performance scolaire (c’est une de ses critiques). Hors, une grosse performance scolaire est associée à un meilleur revenu et un métier plus confortable ce qui évidemment aide pour être plus heureux ou heureuse.
Nos résultats montrent sans ambiguïté que les personnes à haut QI n’ont pas une plus grande prévalence de troubles mentaux que les personnes à QI moyen. Lorsque des différences sont observées, elles vont dans le sens inverse : les HQI ont notamment une plus faible prévalence de troubles anxieux et de stress post-traumatique, ont une personnalité moins névrotique, et souffrent moins d’isolation sociale.4
Pareil pour les ados :
une étude belge récente portant sur une population de 3400 adolescents (Lavrijsen & Verschueren, 2023), a trouvé que les ados à HQI avaient une meilleure estime de soi, moins de troubles de comportement, moins de symptômes d’hyperactivité/inattention, et pas plus de troubles émotionnels et d’inquiétudes que les ados à QI normal.5
R4 | Tous les humains ont une pensée en arborescence
Là-dessus j’ai été étonné. Vous avez vraiment été une grande majorité à répondre correctement : Oui mais les autres aussi.
En fait on ne sait pas ce qu’est la pensée en arborescence en science. On parle plutôt de pensée divergente et pensée convergente. Or, un haut QI est associée à une meilleure performance de la pensée divergente.
Donc oui y’a une petite différence mais c’est dans la qualité de cette pensée et non pas dans sa simple présence. Tout le monde pense en arborescence.
R5 | Le QI mesure certaines aptitudes cognitives
Là encore vous avez été une majorité écrasante (70%) à bien répondre.
L’erreur la plus fréquente (17%) c’est l’idée que y’aurait une intelligence émotionnelle distincte. Or, ce n’est pas ce qu’on observe. En effet, plus les personnes ont des haut QI et plus :
[Elles] sont capables de mieux gérer leurs émotions et développent des compétences socio-émotionnelles les rendant plus heureuses et mieux adaptées, réduisant notamment l’anxiété.6
Le QI ça mesure des aptitudes cognitives qui sont reliées entre elles. En gros on s’est rendus compte que certaines aptitudes allaient globalement ensemble alors qu’on pourrait croire que non.
En voici quelques unes :
Maîtrise du vocabulaire
Compétences arithmétiques
Faculté à repérer des similarités
Culture générale
Résoudre des puzzles
Repérer des “patterns”
Mémoire de court terme (par exemple le nombre d’infos dont on peut se rappeler de tête)
Une personne qui a un haut score sur une de ces aptitudes a tendance à avoir un haut score sur toutes les autres.
Le mot tendance est ici crucial puisque les corrélations sont plus ou moins fortes. Ça ne t’étonnera probablement pas de découvrir que la maîtrise du vocabulaire a une très forte corrélation avec la compréhension. Mais que la maîtrise du vocabulaire a une corrélation moins forte avec les compétences arithmétiques.
MAIS le moins forte est tout aussi crucial. Ça ne veut pas dire que y’a pas de lien. Une personne forte en arithmétique aura tendance également à être forte en vocabulaire.7
Du coup, on a postulé que tout ça provenait du même truc. Et ce truc on l’a appelé le facteur g. Pour facteur général.
Le QI est donc l’outil qui mesure le facteur g.
Est-ce que le facteur g est l’intelligence ? Ça dépend de ta définition de l’intelligence et c’est un sujet extrêmement débattu. La science utilise un terme plus neutre : l’aptitude cognitive générale.
En revanche ce qu’on sait c’est que ce “truc, cette aptitude cognitive générale prédit la réussite scolaire, financière, le bien-être, la capacité à faire n’importe quel job (même les moins qualifiés), etc.
Ce qui est critiqué avec le QI c’est pas sa solidité. Il est très solide. Ce qui est critiqué c’est ce qui est dit mesuré.
Une critique de gauche te dirait qu’en fait il mesure la manière bourgeoise d’exprimer l’intelligence. Or, le monde étant construit autour de ces critères alors ça explique pourquoi un haut QI va mieux performer à l’école et avoir un meilleur travail.
Tu remarqueras que je n’ai pas dit que ça mesure absolument pas l’intelligence. Mais que je rajoute la notion d’expression. Par exemple les TDAH ont tendance à performer moins au test de QI mais juste parce que ce n’est pas compatible avec eux.
Une critique d’extrême-droite dirait que c’est exactement l’intelligence et que si les Noir·es ont un QI plus petit c’est parce qu’iels manquent d’intelligence. Idem les TDAH.
Autant te dire que je penche plutôt pour l’analyse de gauche, tu t’en doutes.
Idem, mais citant Olivier Revol (2006)
Idem