Une loi transphobe devant ses contradictions
En parcourant Twitter je suis tombé sur une vidéo qui m’a saisi aux tripes. C’est l’extrait d’une interview d’un animateur qui s’appelle Jon Stewart et qui confronte la procureure générale de l’Arkansas : Leslie Rutledge.
En effet, elle a fait passer une loi qui interdit aux médecins de proposer aux personnes mineures des traitements hormonaux, des chirurgies et, plus largement tout ce qui peut aider une personne transgenre.
Cette loi a été heureusement suspendue par une juge en appel et on a pas encore l’issue.
J’ai trouvé sa manière de la confronter incroyable dans l’équilibre entre fermeté et pédagogie, voire parfois moquerie.
Mais, j’ai été encore plus content quand j’ai découvert que Jon Stewart lui-même avait fait des blagues transphobes dans sa carrière et qu’il a commencé par s’excuser puis a entamé cette démarche. Se positionnant ainsi à l’inverse de personnes comme Dave Chappelle qui préfère s’arc-bouter sur la liberté d’expression et font dans la surenchère de blagues transphobes, en réponse.
La preuve qu’on peut réagir autrement que on peut plus rien dire. Et tout simplement faire de son mieux pour s’éduquer, en acceptant que soi-même on fait partie du problème plutôt que de dire moi je suis pas transphobe parce que y’a pire que moi.
J’ai décidé de traduire (avec Google Traduction et moi qui élague les bégaiements et le style oral) cet extrait. Donc si tu ne veux pas te spoiler regarde plutôt la vidéo :
Et voici la version texte :
- Pourquoi l'État de l'Arkansas interviendrait-il pour passer outre les parents, les médecins, les psychiatres, les endocrinologues, qui ont élaboré des directives ?Pourquoi ignoreriez-vous ces directives ?
- Eh bien, je pense qu'il est important que tous ces médecins, tous ces experts, pour chacun d'entre eux, il y ait un expert qui dise que nous n'avons pas besoin de permettre aux enfants de prendre ces médicaments.
- Qu'il existe de nombreux cas où...
- Ok… mais vous savez que ce n'est pas vrai : vous savez que ce n'est pas "chacun d’entre eux, il y en a un en face". Ce sont les établis...
- Eh bien non, je ne sais pas que ce n’est pas vrai. C’est vous qui le dites.
- Alors pourquoi passeriez-vous une loi alors si vous ne savez pas ?
- Eh bien, je sais qu'il y a des médecins et que nous avons eu plein de personnes venues témoigner devant notre législature, qui ont dit que 98% des jeunes qui avaient une dysphorie de genre sont capables de dépasser cela. Et, une fois qu'ils ont eu l'aide dont ils ont besoin, ne souffrent plus de dysphorie de genre. 98% sans ce traitement médical.
- Waouh. C'est un chiffre incroyable…ment inventé. Cela ne correspond à aucune des études ou de la documentation qui existe de ces organisations médicales. De quelle association médicale parlez ? Qui sont ces médecins ?
- Eh bien, nous avons tout cela dans notre historique législatif, et nous serons heureux de vous le fournir. Je n'ai pas le nom en tête. Je sais que c'est quelque chose qui…
- Vous n'avez pas le nom de l'organisation... D’où vous tirez ce chiffre ?
- Pas par coeur, non.
- Oh d'accord.
- Mais oui, tout cela est cité dans nos briefs.
- Vous suggérez que protéger les enfants signifie outrepasser les recommandations de l'American Medical Association, de l'American Association of Pediatrics, de l'Endocrine Society...
- Nous n'avons pas assez de données. Nous n'avons pas assez démontrés que ces médicaments sont efficaces et que ces enfants se portent mieux et qu'il faut les encourager...
- Vous n'en avez pas assez ? Ou ça ne vous suffit pas ? Permettez-moi d'essayer d’aborder le problème d'une manière différente et de voir si cela peut aider. En Arkansas, si vous avez un cancer pédiatrique. Et évidemment, nous voulons tous protéger les enfants. Je pense que nous l'avons établi plus tôt. Quelles directives suivez-vous pour le cancer pédiatrique ?
- Eh bien, je pense que je parlerais à mon médecin, et si mon médecin me recommandait quelque chose avec lequel je n'étais pas d'accord, j'obtiendrais un deuxième avis, et c'est ce dont je pense que ces parents ont besoin pour s'assurer qu'ils sont encouragés à obtenir de nombreux avis lorsqu'on parle d'une étape irréversible.
- Vous ne les laissez pas. L'État ne dit pas "demandez un autre avis". Ce que votre loi dit, c'est "tu ne peux pas".
- Non, ce n'est en fait pas du tout ce que l'État a dit. L'État a simplement dit que vous ne pouvez pas effectuer ces procédures, et donc les parents devraient obtenir une autre opinion. Eux et leurs enfants doivent avoir un autre avis. Car encore une fois on parle d’enfants de neuf, dix, onze ans…
- Donc, si votre enfant souffre d'un cancer pédiatrique, et que l'État arrive et vous dit : « Ils recommandent la chimiothérapie, mais nous ne vous laisserons pas faire cela. Vous ne pouvez pas. Nous pensons que vous devriez obtenir une opinion différente. Et voici l'organisation dont nous pensons que vous devriez obtenir l'avis. Ils ne s’inscrivent pas dans la médecine traditionnelle et non pas le consensus scientifique, mais c'est une organisation médicale. C'est donc par eux que vous devez être traitée. Cela ressemble-t-il à quelque chose que vous accepteriez?
- Je pense que c'est un exemple très extrême. Ce n'est pas du tout comparable avec ce dont on parle. Parce que lorsque vous avez un cancer, c'est littéralement mortel, et en particulier un cancer pédiatrique. J’ai des amis qui ont perdu des enfants à cause d'un cancer pédiatrique…
- J'ai une mauvaise nouvelle pour vous. Les parents d'enfants atteints de dysphorie de genre ont perdu des enfants, par suicide et dépression. La souffrance aigüe pousse à ces drames. Et donc, les courants majoritaires de la médecine les organisations médicales ont élaboré des directives à partir de données et d'études examinées par des pairs. Et grâce à ces directives, ils ont amélioré les résultats en matière de santé mentale. Je ne comprends donc pas pourquoi vous suivez les directives de l'AMA et les directives de l'AAP pour tous les autres problèmes de santé dans l'Arkansas. Parce que nous avons vérifié… mais pas pour cela.
- Ce qu’on dit, simplement, c'est laissez ces jeunes, confrontés à la confusion, à la dysphorie des genres devenir des adultes et prendre cette décision à ce moment. Les enfants doivent rester des enfants.
- Alors, voici où nous avons notre divergence. Vous avez déterminé que protéger ces enfants signifie ne pas leur donner accès aux directives et aux soins qui ont été conçus par des professionnels de la santé médicale et mentale, pour les enfants exprimant une dysphorie de genre. Et je vous demande, encore une fois, quelles sont vos qualifications pour intervenir et dire : « Non, vous protéger de ces soins, c'est vous protéger » ?
- Eh bien, ce sont des décisions irréversibles que ces enfants à ces jeunes âges prennent ou qui...
- Ils ne prennent pas la décision. Leurs parents la prennent. Vous tournez les choses de telle sorte qu’on a l'impression qu'un enfant de neuf ans entre dans le cabinet d'un médecin et dit : “Donnez-moi de la testostérone”. Et le médecin répond : “Oh, Dieu merci, parce que nous voulons créer une armée de transgenres, parce que nous sommes fous.” Et ils en donnent immédiatement...
- Nous avons adopté une loi pour protéger les enfants en Arkansas, et je pense que c'est ce qui est important.
- Encore une fois, la communauté médicale n'est pas d'accord avec vous..
- Eh bien pas toute la communauté médicale.
- Qui ?
- Nous avons fait témoigner des experts, ici en Arkansas.
- D'accord. De quelles organisations médicales ?
- Eh bien, nous avons tout cela dans nos mémoires, et je m'excuse de ne pas avoir été prêt à avoir un cas devant la Cour suprême aujourd'hui…
- Ok.