Un aperçu de la formation des CRS
En faisant mes recherches pour écrire mes articles sur la Police, je suis tombé sur un reportage qui se plonge dans la formation des CRS.
Ça s’appelle Notre Doctrine et je te mets le lien complet à la fin.
C’était vraiment intéressant de manière générale parce qu’il pose la question de la doctrine. Car, si la Police opère comme elle opère ce n’est pas un dysfonctionnement mais bien un ensemble de directives et de principes philosophiques : une doctrine.
Et quoi de mieux pour analyser une doctrine que d’aller la constater dans les lieux de formation.
Pendant ce reportage, j’ai été particulièrement marqué par cette scène (je t’ai fait un extrait de la vidéo) :
Contexte : ce sont des élèves CRS et ils commencent à débattre. En effet, comment faire pour séparer les bons des mauvais manifestants (sous entendu les casseurs).
Élève A : Ouais mais t'es d'accord qu'il faut faire la part des choses parfois ?
Élève B : Demande-leur, je sais pas, mais je dirais que non
Précision : l’élève B, on va le voir est en réalité d’accord avec le A. Il dit “je dirais que non” au sens de “je ne pense pas que ça soit ça que l’école veut nous dire”.
Élève A : Brigadier ? Là, dernièrement sur les manifestations Gilets jaunes on a bien vu que face à nous, il pouvait y avoir une diversité. Enfin, que... comment dire... Que chaque individu était très différent. On pouvait autant avoir des gens avec une attitude agressive à côté d'autres gens qui manifestent tout simplement dans leur droit.
Élève B : Ce qu'on veut savoir, brigadier, c'est comment on va faire pour isoler un groupe de casseurs tout en protégeant le reste de la manifestation.
Élève A : En gros, c'est ça.
Le formateur : Pff ça, c'est... Faire le distinguo est quasi impossible et de toute façon, on part du principe qu'une personne qui voit que ça casse, qui reste au milieu, elle cautionne. D'accord. Donc faut voir ça d'une certaine façon. Après, on aura toujours lors des interpellations. T'entends ? J'allais chez mon grand père. J'allais... Tu comprends ? Voilà. Il y a toujours ce phénomène de la flûte comme on l'appelle et auquel on ne prête pas attention parce que nous, on reste concentré. En gros, il faut prendre ça comme un jeu.
Élève C : C'est un jeu, ils nous casse les couilles, ils ont juste envie d'être dans leur rôle. Désolée, mais c'est ça...
Le formateur : Effectivement, c'est toujours la même comédie. Les gens aiment se faire peur. Et pour te répondre Aurélien, notre doctrine se base sur des analyses scientifiques. On n'invente rien. Une foule, globalement, c'est homogène. Donc le mouvement, les slogans, le bruit, tout ça, ça fédère, ça fait un corps, ça crée une masse. Le détail, on laisse ça aux copains de la BAC. Nous, on gère la masse, on est outillés pour ça. Et encore un truc : si tu parles aux gens en début de journée et qu'après on te donne l'ordre de charger, forcément, ils vont pas comprendre. Donc faut être cohérent.
Élève B : Mais du coup chef, on doit, on doit généraliser les gens qui sont dans la foule, on ne peut pas avoir un côté qui va différencier les personnes qui sont là pour manifester, ceux qui sont là pour, pour casser, faut qu'on faut vraiment.
Élève D : Tu veux leur faire remplir un sondage, pendant que t'y es ?
Élève B : Non mais c'est pas...
Le formateur : Visiblement, tu as plus d'expérience que moi. Tu vas peut être faire le cours à notre place.
Élève B : Non.
Le formateur : Hein ?
Élève B : Non, chef !
Voilà. Y’a tout dans cette séquence. On voit comment on instille cette doctrine à l’école. Comment des élèves qui, pourtant, se pose les mêmes questions que nous face à cette doctrine, vont être remis dans le rang.
Ne me lancez même pas sur à que point c’est une très mauvaise posture d’enseignement. Ce n’est pas un climat d’apprentissage mais bien d’endoctrinement.
L’autre séquence qui m’a marqué c’est quand on les entraîne à résister aux Lacrymo. Moi je pensais naïvement qu’ils avaient des produits spéciaux pour résister. Mais non… à l’école on leur balance du Lacrymo, ils vomissent, etc. Jusqu’à s’habituer plus ou moins…
Ça m’a fait de la peine pour eux.
Si tu veux voir le reportage en entier je te mets le lien ci-dessous. J’ai trouvé également intéressant le décalage qui se crée entre les élèves CRS et leur famille, quand ils reviennent pendant les vacances chez eux et que le fossé idéologique se creuse. La doctrine s’ancre petit à petit en eux. De manière si efficace que c’est presque flippant.
Le lien vers le documentaire : https://runtube.re/w/6aea9361-c643-47fd-a667-98f637b491c0