Je t’ai déjà raconté comment ma psy précédente, Line Foëzon, a mis fin unilatéralement et soudainement à environ un an de thérapie :
Dire que c’était brutal est un euphémisme. C’était sauvage.
Je suis tombé dans un trouble dépressif caractérisé dans la foulée. Et aujourd’hui y’a pas mal de séquelles.
Principalement sur l’incapacité à m’ouvrir de nouveau auprès d’une psy.
Depuis cet événement j’ai eu l’occasion de voir trois autres psys.
La tension raciale
Je me rappelle de quand j’étais Blanc. Ma vie était facile. Mélissa (mon amie qui tient le compte Instagram de l’Atelier) m’appelait “mon ami blanc”. Je ne comprenais pas pourquoi à l’époque.
Je suis devenu Noir par deux événements : mon Erasmus en Pologne et les attentats contre Charlie.
Puis je suis devenu antiraciste en me mettant en couple avec une militante féministe.
Avant ça…
… le racisme était un concept vague et appartenant limite au passé pour moi.
Je ne comprenais pas que si mon père me disait avec la peur aux yeux de ne jamais sortir sans ma carte d’identité, c’était pas anodin.
Et puis, accessoirement, j’ai habité neuf ans en Guadeloupe. De mes 09 à 18 ans.
En Guadeloupe je ne suis plus Noir. Enfin… disons que je le suis moins.
La Guadeloupe n’est pas non plus un eldorado. Au contraire on voit encore plus le racisme systémique car la majorité des patrons sont blancs, dans un endroit où la population est à 80% noire, 10% indienne, 6% blanche.
Du coup l’anomalie est encore plus flagrante.
Mais dans le quotidien c’est moins pesant qu’ici.
Mais quel rapport avec les psys ?
On y vient. J’ai donc vu 4 psys. Une qui a très peu parlé de la séance, une psychanalyste à l’ancienne. Et les trois autres… m’ont directement infligé une maladresse raciale.
C’est fatiguant.
Line Foëzon : “ah vous êtes donc polygame”
Alors que je disais que j’étais en relation ouverte. J’ai eu beau lui expliquer qu’on dit jamais ça des personnes blanches. Accessoirement, la polygamie est interdite en France. Quand on dit polygame on pense au système où un homme est marié à plusieurs femmes. Et on imagine un Noir africain.
J’eu beau expliquer par A+B, j’ai eu le droit à je ne savais pas, ce n’était pas mon intention, c’est l’intention qui compte.
Puis, j’ai vu une psy TCC en visio via une application.
Pour le coup c’est moi qui ai abordé la question en parlant de ma psy précédente. Et elle m’a dit
- C’est vrai que tout le monde est raciste depuis toujours, c’est comme ça.
C’était une bonne intention, elle voulait me conforter dans ce qu’elle croyait être ma position il faut arrêter de s’offusquer quand quelqu’un vous dit que tel propos ou acte est raciste, on est dans un pays de culture raciste donc on s’immerge de ça, c’est impossible d’y échapper totalement. Ça fait pas de nous une mauvaise personne.
Mais en ce faisant elle a fait ce que j’appelle le cliché Pocahontas. Tu sais, dans Pocahontas (celui de Disney) on te raconte comment des colons anglais viennent piller les terres de la tribu des Powhatans. Mais on te fait croire que le problème c’est le racisme des deux côtés. Et que l’amour entre Pocahontas et John Smith va se mettre en travers.
On oublie totalement que y’a des colons qui agressent et une tribu qui est chez elle et cherche à se défendre.
Beaucoup de gens y croient.
Mais le fait est que c’est faux. Le racisme a été inventé assez récemment (au 18ème siècle) entre le Royaume-Uni et la France. Notamment dans un livre d’un français qui s’appelle de l’inégalité des races.
On croit souvent qu’il y a eu l’esclavage par racisme, mais c’est faux. C’est l’inverse : c’est parce que l’esclavage devenait de moins en moins moralement défendable qu’on s’est servis des nouvelles thèses de Darwin pour inventer une explication. Ainsi naquit le racisme.
Avant ça on ne pouvait pas être raciste car on ne comprenait pas l’hérédité. On croyait qu’un blanc qui reste en Guadeloupe toute sa vie, finirait par avoir des petits-enfants noirs. Que c’était une fonction de l’environnement.
Je lui ai donc expliqué. Elle m’a répondu
- Vous avez une vision très pessimiste de l’humanité
- Mais pas du tout ? Je suis une personne optimiste avec une grande foi dans l’humanité. Mais je n’invente pas la vérité scientifique. Je vais pas inventer que le racisme n’a pas été inventé par les britanniques et les français. En plus c’est une bonne nouvelle, non ? Si le racisme n’a pas toujours existé alors il peut disparaître.
Elle a botté en touche.
Mais à la fin de la séance elle est revenue dessus en s’excusant et en disant qu’elle n’aurait pas dû s’engager dans un débat en manquant de connaissances. Qu’elle ne savait pas pourquoi elle avait fait ça.
J’avais beaucoup aimé cette réaction. On ne peut pas exiger la perfection. Moi-même je me fais régulièrement épingler mes amies sur mon sexisme.
Ce qui compte c’est justement la réaction.
Mais… il n’empêche que ça reste pesant dans le contexte de la psychothérapie où on vient en détresse (ce n’est pas toujours le cas mais là il y avait urgence suite à dépression). On a pas envie d’avoir la position de prof. C’est de l’énergie.
Une psy de couple
Et… avant-hier j’ai vu une psy de couple.
Elle m’a demandé de me présenter. Et sa première question : vous avez quel âge ? Vous êtes originaire de Paris.
Je me suis tellement protégé de cette question tu viens d’où. Que je ne savais plus quoi dire.
J’ai bégayé.
Je ne sais même plus quoi.
J’avais oublié que des gens posaient cette question.
L’obsession de l’origine.
Comment on fait si la réponse est je ne sais pas… on a retiré leurs noms aux esclaves, Galita est un nom inventé, il n’existe pas avant l’abolition.
Pour l’anecdote : c’est pour ça que Malcolm X a décidé de se faire appeler X. Pour rappeler que son nom de famille véritable est inconnu.
Comment trouver un endroit safe ?
Le pire c’est que, autant je ne recommanderais à aucune personne noire de consulter Line, ma première psy. Autant je ne dirais pas ça des deux suivantes.
Mais…
Ça reste pesant…
La question de la non-monogamie
L’autre point compliqué c’est qu’une psy monogame peut vite s’avérer violente sans le faire exprès.
D’ailleurs sur ce point, Line a fait le grand chelem : m’appeler polygame c’est à la fois une violence raciale et une violence monogame.
J’ai eu le déclic sur le fait que je ne pouvais pas avoir une psy illettrée sur la non-monogamie en lisant le livre Polysecure :
Parfois, leurs proches, voire des thérapeutes, conseillent à ces couples ou individus en difficulté de revenir à la monogamie.
J'ai entendu de tels couples recevoir des conseils qui ressemblent à quelque chose comme : " Eh bien, si vous avez plus de difficultés dans votre relation ou avec vous-même maintenant que vous êtes polyamoureux, vous devriez simplement revenir à la monogamie et tout ira bien à nouveau. "
Pour moi, dire aux personnes qui ont du mal à passer de la monogamie à la Non-Monogamie Consensuelle de revenir à la monogamie parce que la Non-Monogamie Consensuelle est tout simplement trop difficile, c'est comme dire aux nouveaux parents d'un nourrisson qui ont du mal à dormir ou à avoir du temps pour eux qu'ils devraient peut-être renvoyer l'enfant puisqu'ils n'avaient aucun de ces problèmes avant l'arrivée de l'enfant.
Cette analogie peut sembler ridicule parce qu'il est littéralement impossible de renvoyer l'enfant, mais c'est exactement ce que peuvent ressentir les personnes qui ont fait la transition de la monogamie à la Non-Monogamie Consensuelle, en particulier celles qui vivent la Non-Monogamie Consensuelle non pas comme un choix de vie mais comme ce qu'elles sont fondamentalement.
Culturellement, nous savons qu'il ne faut pas dire aux gens de donner leurs enfants lorsqu'ils luttent contre les réalités de la parentalité.
Nous savons également qu'il ne faut pas dire à une personne qui lutte contre les réalités de son coming out en tant que lesbienne, gay, bisexuel ou transgenre qu'elle devrait simplement redevenir hétérosexuelle ou revenir à son sexe de naissance, car être LGBT dans un monde majoritairement hétérosexuel et sexiste est tout simplement trop difficile.Mais lorsqu'il s'agit de la CNM, nos amis bien intentionnés, notre famille et même les professionnels de l'aide ne savent pas nécessairement ce qu'il en est et ils peuvent être prompts à pointer du doigt la CNM comme étant le problème.
Ce livre m’a ouvert les yeux, mis des mots sur ce que je vivais. C’était cool. J’ai eu envie de faire une thérapie avec l’autrice. Mais ce n’est pas possible, elle est américaine…
Mais moins cool… ça me laisse aussi avec l’impression que trouver une thérapeute adaptée à moi sera impossible.
J’ai pas de note d’espoir à donner…
Peut-être une bouteille à la mer. Si quelqu’un connaît quelqu’un qui connaît une psy qui soit pas psychanalyste, polyfriendly (ou au moins qui travaille déjà avec des personnes queers), racisée ou qui a l’habitude de travailler avec des personnes racisées…
Et bah c’est le moment de le dire.
Exceptionnellement je laisse les commentaires ouverts. Mais ça peut aussi être par retour d’email.
Hello. Tout d'abord: compassion. Ca toi pas être simple. Je ne peux malheureusement pas t'aider mais peut être te donner des pistes pour trouver. Je suis en galère de psys depuis des années. J'en ai vu des bons et des moins bons. Mais mon souci c'est que je souffre d'un tsa qu'on vient seulement de diagnostiquer (a 41 ans c'est cool) Pourquoi? Personne ne l'a jamais vu. Et quand j'ai eu des doutes par moi même et que j'ai demandé un diagnostic, on m'a envoyé bouler. Pour trouver mon psy actuel et obtenir un diag, j'ai google comme une malade et commencé à suivre des comptes d'autistes sur tik tok. Et j'ai trouvé un psy qui travaillait avec des assos, était spécialisé sur le sujet et les diags. C'était le gars qui revenait le plus dans mes recherches. Ton cas est peut être un peu plus spécifique (du moins en France) mais à force de fouiller sur le sujet, tu vas sans doute finir par trouver des cas similaires. L'algo de tik tok est bien fait, si tu cherches et puis des personnes intéressées par ces problématiques, tu vas finir par voir des liens intéressants.
Bonjour à tous, j'ai à la fois très envie de vous dire quelques mots sur mes années d'errance, d'un psy à l'autre (psychiatre, psychanalyste, psychologue, psychothérapeute) durant une quinzaine d'années - mais finalement, c'est passé, quel intérêt ? -
et j'ai encore plus envie de vous dire mon enthousiame et ma gratitude pour la personne qui m'accompagne depuis plusieurs mois maintenant.
Nicolas parle d'une "bouteille à la mer", alors je vais à l'essentiel :
Il s'agit de la thérapie d'acceptation et d'engagement (ACT)
et l'excellent psychologue et psychothérapeute en question est joignable ici : https://www.mmpsychologie.com/le-cabinet-de-marin-a-grenoble
ça fonctionne très bien à distance, je peux en témoigner.
Je vous souhaite de trouver l'approche et le thérapeute qui vous conviennent,
Belle journée à tous.