Les 5 pôles de la dépression
Voici le diagramme le plus important à retenir sur la dépression, selon moi :
La notion la plus importante pour comprendre le schéma : il n’y a pas de début.
Chacun des pôles peut être une cause ou une conséquence de la dépression.
C’est ce qui donne à la dépression son côté de spirale infernale. Cette dualité cause/conséquence est également ce qui crée les malentendus. Par exemple quand tes proches te disent tu devrais faire du sport, t’aérer, t’as envie de répondre bah si c’était si facile !!!
Le truc c’est que vous ne parlez pas de la même chose.
J’ai vécu les 3 cas :
La dépression est engendrée, en partie, par une baisse drastique de mon activité physique. Et dans ce cas, reprends le sport est un excellent conseil.
La dépression est responsable de la baisse de mon activité physique. Dans ce cas reprends le sport est un horrible conseil. Ce serait comme dire à quelqu’un qui à un rhume arrête de tousser. Ici la baisse de l’activité est un symptôme.
Autre chose a créé la dépression qui ensuite a diminué mon énergie, qui en retour a diminué mon activité physique. Dans ce cas reprends le sport est un conseil mi-figue, mi raisin.
Bien entendu, dans tous les cas reprendre le sport peut diminuer ma dépression puisque les pôles sont interdépendants, mais dans certains cas c’est tout simplement trop dur.
« Mais POURQUOI tu déprimes ? »
Y’a une autre questions que les personnes déprimées détestent généralement c’est pourquoi tu déprimes. Au lieu de comment je peux t’aider… chaque fois je le vis comme une perte de temps. En plus je me sens mal parce que ma réponse était je ne sais pas, c’est justement comme ça que je sais que c’est une dépression : parce que j’ai pas de raison de ressentir autant de tristesse.
Pire, ça amène des gens à s’auto-flageller en disant j’ai honte de me sentir mal alors que tout va bien dans ma vie. Problème : l’autocritique sévère fait partie du diagramme et donc renforce la dépression.
Mais, là encore, le grand public a pas entièrement tort : une dépression peut bel et bien être causée par une raison très identifiable comme une rupture amoureuse, un décès, un gros conflit, trop de stress…
Dans ce cas c’est utile de le conscientiser. Moi par exemple je sais qu’une de mes dépressions a été guérie quand j’ai pu écrire je suis déprimé parce que j’ai vécu une injustice e et que je n’arrive pas à me pardonner d’avoir été trop sidéré pour riposter mais je peux toujours riposter.
Mais parfois le conscientiser ne changera rien.
Pire encore, tu te rappelles que chaque pôle peut être une cause et une conséquence ?
Bah j’ai déjà vécu l’inverse : je suis en dépression ET DONC ça amène à des conflits qui débouchent sur une rupture amoureuse qui en retour aggrave mon état.
Le plus fréquent chez moi : l’altération du sommeil
J’ai compris récemment que si je faisais des dépressions toutes les vacances d’été c’est parce que pendant les vacances je défonce mon cycle de sommeil.
D’ailleurs j’ai une épiphanie en écrivant ces lignes à ce moment : on m’a beaucoup demandé si j’avais des dépressions cycliques depuis mon adolescence.
Je répondais que non, pour aussi loin que je m’en souvienne ça a démarré vers 2017-2018… et je viens de percuter que c’est aussi l’année où j’ai décidé de commencer à prendre de vraies longues vacances l’été.
Et c’était une bonne décision, hein ? Prenez des vacances.
Le souci c’est qu’en vacances j’ai tendance à ne plus voir de raison de me coucher. Donc je me couche à 5h du matin (surtout si y’a des séries Netflix) et je me réveille à 13h00 voire 14h00.
Cette perturbation de mon sommeil, affecte le reste et… il suffit d’une légère étincelle dans un autre pôle pour faire partir le feu de la dépression.
À l’inverse, j’ai vécu des dépressions qui n’avaient rien à voir en termes de causes mais qui, du coup, perturbaient mon sommeil. Ici le sommeil altéré est la conséquence.
Le mécanisme le plus mystérieux : le cerveau
Ici je marche sur des œufs donc je préfère te citer un passage du guide d’autosoin de la dépression plutôt que de paraphraser :
Une théorie sur la dépression suggère qu’elle serait causée par des modifications au niveau du fonctionnement du cerveau, un « déséquilibre chimique ». La recherche a démontré que chez certaines personnes déprimées, il y avait des neurotransmetteurs moins actifs dans le cerveau. On ne sait pas si ces changements au niveau de la chimie du cerveau sont une cause fréquente de dépression. Nous savons toutefois que la dépression est souvent associée à des changements au niveau de la chimie du cerveau.
En raison des changements physiologiques causés par la dépression, la personne déprimée a plus de difficulté à surmonter les problèmes de la vie quotidienne et même à suivre les étapes d’un programme d’autosoins de la dépression comme celui-ci.
Les médicaments antidépresseurs permettent souvent de rendre au sommeil sa qualité réparatrice et de fournir l’énergie dont vous avez besoin pour apprendre activement et mettre à l’essai les nouvelles stratégies qui vous permettront de surmonter la dépression.
Y’a beaucoup de fantasmes sur les médicaments antidépresseurs alors qu’il ne faut ni les diaboliser, ni penser que ça résout toutes les dépressions. C’est un levier comme les autres. Dans certains cas ce ne sera pas utile, dans d’autres ce sera quasi impossible de s’en sortir sans les médicaments car la chimie de notre cerveau aura été trop altérée.
L’exception du Burn-out autistique
98% des burn-out autistiques débouchent sur des dépressions. Conclusion : le diagramme est incomplet pour une personne autiste.
Si tu es autiste y’a un sixième pôle : le masking.
Le masking c’est tous les efforts que tu déploies pour ne pas avoir l’air autiste. Le souci c’est que ces efforts ont un coût énergétique et que donc si tu les doses mal ils génèrent un épuisement qui s’appelle le burn-out autistique.
Note : avant d’arriver là tu vivras probablement des fatigues et/ou des shutdowns autistiques.
Le burnout autistique n’est pas une dépression. De la même manière que le sommeil altéré n’est pas une dépression. En revanche le burnout autistique déclenche une dépression, de la même manière que le sommeil altéré peut déclencher une dépression.
Mais puisque qu’on parle de 98% de burn-out autistique débouchant sur une dépression ça veut dire que, quasiment tout le temps, on observe les deux en même temps. Par conséquent, quels sont les traits différentiants ?
Les traits autistiques semblent se renforcer : si tu es sensible aux bruits tu l’es ENCORE PLUS, si tu as du mal avec le small talk t’as ENCORE PLUS DE MAL, et si tu aimes la constance (par exemple manger la même chose, jouer au même jeu), bah c’est ENCORE PLUS.
Certains intérêts intenses s’intensifient : un peu comme si tu avais des sujets doudou qui résistaient à l’état dépressif, voire même qui te redonnaient de l’énergie. Alors que la dépression classique a plutôt tendance à diminuer tout ton goût pour tes passions.
L’isolement social est un besoin dur à réprimer voire même un élément de guérison : alors que la dépression est plutôt guérie en rompant l’isolement social. C’est selon moi la différence la plus chiante. Car, à chaque fois, il a fallu que je commence par une phase de retrait complet (même de mes proches) avant de sentir que le burn-out diminue et qu’il est temps d’attaquer la dépression en me forçant à voir des gens. Deux solutions opposées donc. Impossible à appliquer en même temps.
Le burnout ne perturbe pas le sommeil, en soi : certes, puisque tu es fatigué·e tu as besoin de dormir davantage, mais le burnout ne te crée pas les insomnies, ça c’est la dépression qui le fait.
Le guide d’autosoins
Je te reparlerai plus en détail de ce qu’est le burn-out autistique, mais d’ici là je te conseille ce guide que je t’ai déjà envoyé plein de fois. J’insiste parce que y’a un paradoxe :
Si tu n’es pas en dépression actuellement tu te dis que ça ne te concerne pas pour le moment
Si tu en dépression actuellement tu n’as plus la force de lire tout un guide comme ça.
Donc c’est pas mal de se forcer à le parcourir même si tu n’es pas en dépression. Ne serait-ce que pour savoir comment aider une autre personne, sachant que tu connais forcément une personne déprimée en ce moment même que tu pourrais aider en lisant le guide à sa place et en lui résumant :
https://d3mh72llnfrpe6.cloudfront.net/wp-content/uploads/2018/02/09210226/asw-french.pdf