Le suicide est la première cause de mortalité des policiers français
Vous avez été 77% à répondre le suicide quand je vous ai demandé la première cause de mortalité chez les policiers.
C’est effectivement la bonne réponse.
La police souffre d’un taux de suicide anormalement élevé.
Les meurtres de policiers sont beaucoup plus médiatisés. Mais il sont beaucoup moins nombreux que les accidents de la route en service. Eux-même beaucoup moins nombreux que les suicides.
Mais la question c’est… est-ce “normal” ?
Une profession armée
Il y a une surmortalité par suicide des policiers en comparaison de la population générale. Mais ça ne veut pas dire que c’est spécifique à la police.
Après tout, on pourrait dire que c’est normal d’avoir un plus grand taux de suicide dans une profession où c’est si facile d’accéder à une arme.
Sauf que…
Si c’était le cas on devrait avoir la même chose dans tous les pays.
La police québécoise avait elle aussi un taux de suicide similaire à celui de la police française dans les années quatre-vingt. En trente ans, elle a pris des mesures d'accompagnement, comme l'obligation pour les policiers d'aller régulièrement consulter un psychologue.
Leur taux de suicide a baissé de 80%
On a donc bien un problème dans notre Police.
Le ministère de l’Intérieur camoufle le problème
La France se caractérise ainsi par le peu d’études portant sur le suicide policier, et une difficulté d’accès à ces données. Une telle carence apparaît d’autant plus flagrante et incompréhensible que les Anglo-Saxons et les Canadiens multiplient les recherches sur ce thème.
Voici donc une organisation qui, avant 2010, voyait l’un de ses fonctionnaires se suicider chaque semaine et qui, au lieu d’être alertée par de tels drames, démentait publiquement tout lien entre les conditions de travail et les passages à l’acte, tout en ne sollicitant aucune enquête.
Dans le jargon policier, on parlerait « d’affaire classée sans suite », dénouement bien ironique pour des hommes et des femmes dont le travail consiste à enquêter pour punir les coupables et sauver les victimes !
Le tout en parfaite illégalité puisqu’il y a une obligation de fournir un bilan social. Obligation que le ministère de l’intérieur bafoue allègrement.
Car, ce taux anormalement élevé de suicides s’explique avant tout par des choses qui sont de la responsabilité du ministère de l’intérieur.
Je t’en parlerai plus en détails dans l’article mais il y a déjà un problème de rythme de travail.
Tu as remarqué que dans les films français y’a toujours la figure du policier divorcé ? T’as toujours un ou plusieurs policiers dans le film qui a divorcé ou est en train de divorcer.
Et bien ça s’explique notamment par le rythme du travail qui est dénoncé depuis des années par les syndicats. Les policiers ont un weekend normal (samedi/dimanche) toutes les 6 semaines. Sans compter les horaires décalés.
On pourrait faire autrement… mais pour ça il faudrait recruter. Ce que ne fait pas le ministère.
La situation est deux fois pire que France Télécom
Tu te rappelles quand France Télécom a été privatisé (Orange) et qu’on avait le scandale des suicides ? Il y a même eu un procès contre l’entreprise.
Ce qu’on sait moins c’est, qu’au même moment :
Quand chez France Télécom, quand on avait 35 suicides sur 190 000 salariés (en 2 ans) on avait dans le même temps 97 suicides sur 160 000 policiers.
En d’autres termes il y a plus de 3 fois plus de suicides dans la Police que chez France Télécom durant les années noires qu’on a surnommée la crise des suicides.
Je pense qu’on peut dire que la Police est malade.
Dans un silence coupable.
Je voulais te faire une conclusion disant que les gouvernements prennent petit à petit conscience du problème. C’est vrai, il y a eu quelques mesures. Mais pas plus tard que 2022 voilà ce que dit Darmanin (qui pourtant se fait passer pour un grand amoureux des policiers) :
Ce à quoi le locataire de la place Beauvau a répondu avec un argument souvent entendu. “L’essentiel de ces suicides ont un rapport direct avec la vie personnelle et non pas professionnelle de ces personnes”, a ainsi tenté de nuancer le ministre, assurant pour autant ne pas chercher à “minimiser” la vague de suicides.
Voilà. Le déni.