On peut faire le mal et être récompensé toute sa vie
Je ne vais pas parler du vrai Karma, c’est-à-dire la croyance de la religion hindoue sur laquelle je ne me prononce pas.
Je vais te parler du “karma” comme on l’utilise généralement dans le langage courant. J’affirme qu’il est évident que ça n’existe pas.
Qu’est-ce que le karma ?
Je répète : on laisse de côté le vrai concept hindou qui est complexe et intéressant. On va ici s’intéresser au “karma” du langage courant.
Je dis « courant » mais je devrais dire « whitewashé ». C’est la version du Karma telle que pillée par la culture occidentale.
Le Karma est donc ici l’idée que tout se paie un jour.
C’est cette notion qui est, par exemple, exprimée dans la question : pourquoi tant de personnes corrompues réussissent-elles ?
L’idée est donc de payer dans sa vie actuelle. Puisque, encore une fois, on laisse de côté la dimension religieuse et les réincarnations qui sont de l’ordre de la croyance intime.
Si le karma existe, comment expliquer l’esclavage ?
Il faudrait m’expliquer ce qu’ont fait les esclaves en Guadeloupe dans leur vie pour mériter ça ? Sachant que beaucoup sont nés esclaves. Ils ne le sont pas devenus. Ils n’ont donc pas eu le temps de faire quoi que ce soit de malveillant.
Un Noir né esclave en 1710, en France (Guadeloupe, Martinique, Guyane, etc)…
Qu’a fait le karma pour lui ?
Ça n’a aucun sens : depuis le premier jour de sa naissance il est “puni”. À l’inverse, les maîtres ont eu des vies prospères : de leur naissance jusqu’à leur mort.
Si le karma existe, comment expliquer les conséquences de l’esclavage ?
À l’abolition de l’esclavage en France (1848) on a décidé qu’il fallait verser des indemnités pour le préjudice.
On a donc versé des indemnités… aux maîtres. L’idée c’est que, puisqu’un esclave était considéré comme un meuble, un bien, il fallait leur rembourser cette perte financière.
Beaucoup d’esclaves, à la libération, sont d’ailleurs retournés travailler dans les champs, pour les mêmes personnes. Mais en échange d’un salaire et sans les coups de fouets.
Ce déséquilibre de départ fait que, aujourd’hui encore, les descendants de colons (les békés) possèdent un pouvoir économique beaucoup plus grand que leur nombre.
Où est le Karma ? Où est la justice dans cette situation ?
Si le karma existe, comment expliquer le destin de Reinhard Höhn ?
Reinhard Höhn est un nazi qui a été pardonné après guerre. Comme beaucoup d’entre eux puisque la grande loi d’impunité d’Adenauer en 1949 a amnistié 800 000 anciens officiers nazis.
Il a ensuite vécu une vie tranquille et pleine de succès puisqu’il a écrit plusieurs livres best-seller sur le management. Il a également posé les bases du management moderne en enseignant les principes qu’il avait appris pendant les belles heures du nazisme.
Il est mort à 96 ans.
Alors que des millions de victimes du nazisme étaient des enfants innocents. Là encore… où est le Karma ?
Si le karma existait, le mal disparaîtrait au bout de quelques années
Si on payait pour nos mauvaises actions et qu’on était récompensés pour les bonnes, il n’y aurait plus aucun intérêt à faire de mauvaises actions. Elles finiraient donc par disparaître.
S’il était vrai que “bien mal acquis ne profite jamais” il n’y aurait plus de voleurs. Quand quelqu’un vole quelque chose, il le fait parce qu’il sait qu’il y a une chance qu’on ne l’attrape jamais et qu’il ne soit jamais puni. Sinon il ne le ferait plus !
Le karma n’existe pas car on ne vit pas dans un film
À force de regarder des Disney ou des films de Hollywood on finit par croire que ça décrit la réalité.
Mais dans la vraie vie les méchants ne sont pas forcément punis et les gentils ne sont pas forcément récompensés. D’ailleurs, dans la vraie vie très peu de gens sont des gentils innocents ou des méchants. J’ai pris des exemples extrêmes pour illustrer mais la plupart des gens sont entre les deux.
Le Karma n’existe pas dans la vraie vie. Heureusement d’ailleurs. C’est parce qu’il n’existe pas que la vie est intéressante. Sinon, on ferait le bien uniquement pour être récompensé un jour par le karma.
La notion de Karma est injuste envers les victimes
Ce besoin de trouver un sens aux choses aléatoires porte un nom en psychologie : la croyance en un monde juste.
C’est l’idée selon laquelle tout a un sens, un mérite. Le problème c’est que ça implique qu’une victime a toujours un peu cherché son sort. C’est une idée extrêmement dangereuse qui nous coupe de notre empathie naturelle pour nous protéger du sentiment d’injustice.
En dépouillant le concept on l’a vidé de son sens
En effet, dans le concept hindou, le karma va de pair avec la réincarnation. On peut donc vivre une vie pourrie par punition d’une vie antérieure.
Tout de suite c’est plus cohérent. Ça a le mérite de tenir debout plus solidement. À condition bien sûr de croire en la réincarnation.
Mais si ce n’est pas notre cas… je pense qu’on devrait arrêter de singer ce concept pour en faire une idée si toxique.