Pour cette seconde semaine de trêve estivale on revient sur un article où j’expliquais en détails les raisons de ne pas faire d’enfants. À travers mon propre cheminement. L’idée ce n’est pas de dire quoi faire, mais de comprendre la matrice. On peut faire des enfants en ayant conscience de la matrice.
Confession #2 : je ne veux pas avoir d’enfant
Si on m’avait dit les torrents de boue que j’allais recevoir en publiant la première confession, je ne l’aurais pas cru.
Pourtant, tout est dans le concept des confessions : expliquer que je n’adhère pas à une position religieuse. Je dis religieuse car certaines pressions sociales fonctionnent exactement comme une religion.
Il s’agit donc de blasphémer. Annoncer que l’on est pas monogame est un blasphème. Je le savais. Mais je ne réalisais pas à quel point.
Certaines personnes ont été jusqu’à expliquer à mon patron que je nuisais à l’image de l’entreprise avec cet article (sous-entendu il faut me faire taire ou me virer). Heureusement, il m’a totalement soutenu. Mais ça reste violent à vivre.
D’autres l’on fait en public :
On sort largement du cadre du désaccord. La réaction est celle d’une inquisition face à un blasphème.
Suite à ça, j’ai fait une pause d’écriture de plusieurs mois. C’était la première fois en 8 ans. Mais j’avais besoin de cette pause pour me ressourcer.
Nous voici donc plusieurs mois après la première confession. Il est temps de vous faire la deuxième : je ne veux pas d’enfants.
Je pense qu’elle est un peu moins coûteuse à faire quand on est un homme. Pour la préparer, j’ai lu un article avec des témoignages et l’auteur note :
“Les femmes qui ont accepté de parler à visage découvert se comptent sur les doigts d’une main”.
Mais elle n’est pas gratuite pour autant : j’ai perdu des relations amoureuses par cette confession.
Voyons ensemble comment je suis sorti de la religion de la parentalité.Comme la dernière fois, on va commencer par analyser le culte à travers ses idées reçues.
Mais avant de commencer je précise quelque chose de fondamental : ceci est une rationnalisation a posteriori de mon cheminement. En vrai, la seule réponse à “pourquoi tu veux pas d’enfant” c’est “parce que”. C’est comme quand on demande “pourquoi tu aimes cette personne”. La seule réponse possible est “parce que”. Même si on peut rationaliser ensuite en parlant de sa personnalité.
Les idées admises sur la parentalité
Commençons par les idées admises sur la parentalité. Ce qu’on répète sans y réfléchir.
Idée admise #1| C’est un bonheur
L’accouchement est le plus beau jour de la vie. Même si, bizarrement, tout le monde semble aussi dire que le mariage est le plus beau jour de la vie. Faudrait se mettre d’accord ?
Mais ça ne s’arrête pas au jour de l’accouchement. On admet également que la parentalité est un bonheur, en soi.
Conséquence : il faut la rechercher. On se met donc à faire des plans de paternalité. On accorde ses choix professionnels en fonction, on accorde ses choix de logement en fonction, etc.
Idée admise #2| C’est une étape obligatoire de la vie rêvée
Mais plus qu’un simple bonheur : on l’envisage comme une étape incontournable. Un passage obligatoire pour une vie réussie : un CDI, un mariage, un appartement ou une maison et un enfant. Le carré magique.
On court sur ce chemin sans trop se poser de questions.
“Si 12% des français n’auront pas d’enfants, ils seraient moins de 5% à en faire la démarche volontaire”
Notons que la France est un cas particulier : la pression à l’enfant y est bien plus forte que dans beaucoup d’autres pays occidentaux. On peut le voir à travers les chiffres de la natalité : la France est le pays le plus fécond de l’Union Européenne.
Ou à travers les chiffres de stérilisation volontaire. Beaucoup de médecins refusent de la pratiquer. Au final, “4% des françaises seulement le pratiquent, alors qu’il s’agit de la première méthode contraceptive au niveau mondial. 36% des américaines y ont recours, un tiers des canadiennes”
Idée admise #3 | C’est avant tout un sujet de femme
La femme doit s’épanouir en devenant mère. On ne le dit plus comme ça mais on le sous-entend très fortement. Passé 30 ans, l’entourage vous regarde bizarrement, des inconnus sous-entendent que vous n’êtes pas normale…
Héritage de notre culture chrétienne puisque la Bible est claire :
Je ne permets pas à la femme d’enseigner, ni de faire la loi à l’homme, qu’elle se tienne tranquille. C’est Adam en effet qui fut formé le premier, Eve ensuite. Et ce n’est pas Adam qui se laissa séduire, mais la femme qui séduite, a désobéi. Néanmoins, elle sera sauvée par la maternité si elle persévère avec modestie dans la foi, dans la charité, et dans la sainteté
Pire encore, on accepte inconsciemment l’idée selon laquelle c’est à la femme de s’occuper des enfants. Mettez sur LinkedIn la photo d’un père qui s’occupe de son enfant et vous aurez des milliers de likes et d’encouragement. Mettez la photo d’une mère et vous aurez de l’indifférence.
“Quand les hommes deviennent pères, leur activité professionnelle augmente et ils dédient davantage de temps à leur travail, l’opposé des femmes.
Les études montrent que les hommes qui ont des carrières brillantes sont souvent des pères de plusieurs enfants, alors que les femmes qui ont les carrières les plus accomplies sont souvent sans enfants.
Il n’y a aucun doute : les enfants sont un accélérateur pour les uns, un fardeau pour les unes.”
D’ailleurs, les hommes peuvent abandonner leurs enfants sans stigmate social. On intègre inconsciemment l’idée selon laquelle il est normal d’avoir un homme qui n’assume pas sa paternité. Je ne dis pas qu’on trouve ça bien, mais on n’est pas étonné : ça fait partie de notre cadre de référence.
La série documentaire “en bref” (VO : explained) a consacré un sujet sur les inégalités salariales entre les hommes et les femmes ? Conclusion ?
« Les femmes sans enfants gagnent quasiment autant que les hommes. C’est donc une sanction à la maternité »
« La plupart des facteurs qui fondaient l’inégalité entre hommes et femmes se sont résorbés. Sauf un.
Ce qui est resté c’est que les femmes s’occupent des enfants, on suppose qu’elles sont le parent principal.
Même quand une femme travaille à plein temps comme son partenaire, elle passe 25 heures par semaine à s’occuper des enfants et de la maison, contre 16 heures pour son partenaire. Sur un an c’est l’équivalent de trois mois à temps plein . Voici le réacteur principal des inégalités salariales»
Les indices qui me faisaient douter de la paternité
On se dit à demain pour la suite
Merci d’avoir ressorti ces articles. En ce moment le sujet me taraude beaucoup. Je passe mon temps à me justifier intérieurement sur mon non-désir d’enfants.