Ce que tu t’apprêtes à lire est normalement un format exclusif aux premium : tous les mois, je fais la revue des livres que j’ai lus. J’ai décidé, exceptionnellement, de l’envoyer à tout le monde pour deux raisons.
La première c’est que je trouve que le livre en question mérite d’être partagé massivement. La seconde c’est que ça va me permettre de clôturer mon offre d’été. En effet, tu peux essayer gratuitement le format premium pendant deux semaines. Puis ensuite, ça bascule à 6,99€ au lieu de 8,99€.
Mais, toutes les bonnes choses ont une fin. Donc c’est ta dernière chance. Ensuite on repasse à la formule habituelle : aucun essai, c’est 8,99€/mois dès le premier jour.
Ceci étant dit, c’est parti pour mes lectures d’août. Et, en l’occurrence, ma lecture puisque je n’ai lu qu’un seul livre.
La méthode simple pour en finir avec la cigarette - Allen Carr
Ma note : ★★★★★ ou ★★★☆☆
Ça dépend ce qu’on note. Ce n’est pas un très bon livre car c’est très répétitif. En revanche, ça m’a l’air d’être une excellente méthode.
Comment je suis tombé sur ce livre ?
Je disais à l’une d’entre vous que je pensais que la prochaine formation serait celle pour apprendre à arrêter le sucre. Elle m’a répondu qu’elle allait bientôt se lancer dans une désintoxication au sucre et que ça lui rappelait quand elle avait arrêter de fumer.
C’est là qu’elle m’a dit que c’était grâce à ce livre qu’elle avait arrêté.
Ce que je n’ai pas aimé
Dire que c’est répétitif est une minimisation. Il passe son temps à répéter la même chose. Mais je comprends pourquoi c’est nécessaire. D’autant plus que trois personnes m’ont parlé de ce livre dans ma vie. En me disant que ça avait été radical pour elles. Et les trois m’ont fait un résumé totalement faux du livre. Tout en me disant “il se répète tout le temps”.
J’ai trouvé ça fou. Ça m’a frappé dès les premières lignes. Ce livre est l’inverse de ce qu’on m’a résumé, à l’unanimité.
On me disait : c’est un livre répétitif mais efficace car il te répète pourquoi arrêter de fumer, par tous les angles possibles.
Du coup, j’ai toujours été réticent à le lire puisque je ne fume pas et que je pense avoir déjà fait le tour des dégâts de la cigarette avec le livre Interdire le tabac : l'urgence! que j’ai lu il y a longtemps déjà.
Par conséquent, je ne comprenais pas pourquoi les personnes étaient si enthousiastes : qui ignore vraiment les raisons d’arrêter de fumer ? C’est littéralement écrit sur chaque paquet !
Ce que j’ai aimé
Justement : il explique pourquoi le livre est tout l’inverse. En réalité, il ne s’agit pas d’expliquer pourquoi arrêter mais plutôt de comprendre pourquoi on continue.
Ça peut paraître subtil mais ça change tout.
Pourquoi fumer ? Qu’est-ce que ça apporte ?
L’auteur propose de répondre à cette question pour être capable ensuite d’arrêter.
Aucun fumeur ne sait pourquoi il fume.
S’il connaissait la vraie raison, il ne fumerait plus. J’ai posé la question à des milliers de fumeurs lors de mes consultations.
La vraie raison est identique pour chaque fumeur, mais la variété des réponses demeure infinie. Je trouve que cette étape de ma consultation est la plus amusante, mais en même temps une des plus pathétiques.
La dépendance physique et la dépendance psychologique
La cigarette est un piège très vicieux. En effet, contrairement à ce qu’on pense, il s’agit d’une des drogues qui cause le moins de dépendance. Et c’est pour ça qu’elle cause le plus de dépendance.
Qu’est-ce que ce paradoxe ? En fait, la dépendance physique de la cigarette est très faible. Ce n’est pas comme l’alcool qui peut tuer quand le sevrage est trop brutal.
En réalité, les vrais symptômes du manque de nicotine sont si légers que la plus grande partie des fumeurs ont vécu et sont morts sans même se rendre compte qu’ils étaient drogués.
Durant nos premiers jours d’adepte, ces symptômes de manque et leur soulagement sont si infimes que nous ne sommes même pas conscients de leur existence. Lorsque nous commençons à fumer régulièrement, nous pensons qu’ils surviennent soit parce que nous sommes arrivés à apprécier réellement la cigarette, soit parce que nous en avons pris l’habitude.
Il est là le piège. En effet, l’addiction monte très progressivement. Au point qu’on ne la sent même pas. C’est grâce à cette subtilité qu’elle induit une dépendance encore pire : la dépendance psychologique.
En quoi consiste cette dépendance ?
On confond plaisir et soulagement de la douleur.
La cigarette est un pompier pyromane. C’est-à-dire qu’elle crée une douleur et qu’elle la résorbe. Un peu comme si on mettait des chaussures trop petites toute la journée, pour le seul plaisir de les enlever.
Je pense cependant que l’aspect le plus pathétique de la cigarette est que la satisfaction que le fumeur en retire est le plaisir de revenir à l’état de paix et de tranquillité de son corps avant qu’il ne tombe sous l’emprise du tabac.
Pourquoi les méthodes classiques sont difficiles
Voilà probablement son idée la plus structurante : il affirme qu’arrêter de fumer est facile. À condition de le vouloir (et de comprendre pourquoi on fume).
Mais le vouloir est très compliqué. Parce qu’on s’imagine sacrifier quelque chose. Or, si on comprend pourquoi on fume, on ne voit plus l’arrêt comme un sacrifice.
Ce pourquoi c’est ce qu’il appelle le petit monstre dans l’estomac. Une allégorie de la dépendance physique à la nicotine.
Dès la première cigarette, on installe un monstre vorace qui réclame sa dose. De plus en plus fort d’ailleurs.
Mais la bonne nouvelle c’est que refuser de nourrir le monstre engendre maximum trois semaines de vrais effets physiques.
La mauvaise c’est que ça commence dès la première. Même si vous aviez arrêté de fumer pendant dix ans et que vous en fumez une juste comme ça.
En d’autres termes : on continue de fumer parce qu’on est drogué·e. Ce n’est pas une habitude, ce n’est pas un simple plaisir.
Que ceux d’entre vous qui pensent apprécier les cigarettes se demandent pourquoi ils peuvent maîtriser d’autres habitudes, pourtant bien plus agréables. Pourquoi devez-vous impérativement allumer une cigarette, pourquoi paniquez-vous si vous n’en avez pas ?
D’autres prétendent que les cigarettes sont très agréables. C’est faux. Ce sont des objets absolument infects. Demandez à n’importe quel fumeur qui croit fumer pour le plaisir s’il se retient de fumer lorsqu’il ne trouve plus ses cigarettes habituelles et qu’il dispose seulement d’une marque qu’il n’aime pas.
Les fumeurs préfèrent fumer de la vieille corde pourrie plutôt que de s’abstenir. Le plaisir n’a rien à voir là-dedans.
J’aime le homard, mais je n’en suis jamais arrivé au point où je me promenerais avec vingt homards suspendus autour du cou. Il y a bien d’autres choses dans la vie que nous apprécions lorsque nous les avons, mais dont nous ne nous sentons pas privés en leur absence.
Tant qu’on n’accepte pas que c’est une drogue, on a du mal à arrêter. Si c’est juste “un vice”, une “mauvaise habitude”, on est dans le déni. Et on croit sacrifier quelque chose en arrêtant
La raison rationnelle de fumer
Or, quand on croit vraiment que la cigarette nous fait plaisir, ça devient rationnel de continuer. Après tout, si on me disait que je devais arrêter d’écouter de la musique toute ma vie ou réduire mon espérance de vie, il est très possible que j’accepte de réduire mon espérance de vie.
C’est logique de ne pas vouloir renoncer à une vraie source de plaisir. Même au prix d’années de sa vie. Après tout, on peut se dire qu’il vaut mieux une vie courte mais épanouie qu’une vie longue et ennuyeuse.
Sauf que c’est une illusion : la vie sans cigarette n’est pas une vie dépourvue d’un plaisir, c’est au contraire une vie dépourvue de ce monstre dans l’estomac qui réclame un produit dont le goût est infect.
C’est pourquoi le fumeur pense qu’il manque de volonté. Ce n’est pas vrai ; il a seulement changé d’avis en prenant une décision parfaitement rationnelle au vu des informations dont il disposait.
En effet, à quoi bon être en bonne santé si l’on est malheureux ? À quoi bon être riche si on est malheureux ? Il vaut bien mieux avoir une vie agréable et un peu plus courte qu’une longue vie misérable. Heureusement, cette conclusion est complètement fausse. La vie d’un non-fumeur est vraiment plus appréciable.
Tant que quelqu’un est convaincu que la cigarette lui apporte quelque chose, lui expliquer les raisons d’arrêter ne va pas beaucoup l’aider. Surtout que, minimiser le statut de drogue de la cigarette fait qu’on résume l’arrêt à une simple question de volonté.
Alors que beaucoup de fumeurs ont autant de volonté que les autres, voire plus. La volonté ne sert à rien si elle est mélangée avec du déni. La volonté ne suffit pas si on avance dans un labyrinthe sans avoir la clé.
La drogue agit par son absence. C’est pourquoi il est difficile de se débarrasser de n’importe quelle drogue. C’est lorsque vous ne fumez pas que vous souffrez : vous ne considérez donc pas la cigarette comme responsable. Lorsque vous l’allumez, elle vous soulage immédiatement : ainsi, vous êtes complètement dupé, assimilant la cigarette à quelque plaisir ou soutien.
Si le tabagisme se limitait à une habitude, nous devrions, à cause des multiples inconvénients qu’il présente (en particulier son mauvais goût, le danger pour notre santé, son coût sans cesse plus grand, le simple fait que nous soyons conscients que c’est dégoûtant et que nous aimerions nous en débarrasser…), nous arrêter sans aucun problème. Pourquoi trouvons-nous cela si difficile ? La réponse est qu’il ne s’agit pas d’une habitude, mais d’une dépendance à l’égard d’une drogue.
Mais… pas de panique. C’est plutôt une bonne nouvelle. Car, comme on l’a vu c’est une drogue légère. C’est ce qui la rend si dangereuse car on ne se rend pas compte qu’on tombe dedans mais c’est aussi ce qui nous permet d’en sortir relativement “facilement”.
Bien que ce soit la drogue la plus puissante par la rapidité avec laquelle on y succombe, son emprise n’est jamais très forte. Comme c’est une drogue d’action très rapide, il suffit de trois semaines pour que 99 % de la nicotine évacue l’organisme et les symptômes de manque sont pratiquement insignifiants ; comme je l’ai dit, certains ont même vécu le sevrage du tabac sans en avoir jamais souffert.
Vous me demanderez alors, à juste titre, pourquoi tant de fumeurs trouvent si difficile d’arrêter, pourquoi ils ont à supporter des mois de torture et passent le reste de leur vie à rêver de temps en temps d’une cigarette. La réponse réside dans la seconde raison pour laquelle nous fumons – le lavage de cerveau. La dépendance chimique demeure facile à supporter.
La grande majorité des fumeurs passent la nuit sans une seule cigarette. Les effets du manque de nicotine ne les réveillent même pas.
“La cigarette me détend et me donne confiance en moi”
Une fois qu’il a établi qu’il s’agissait d’une drogue, il embraye en démontant toutes les fausses raisons qu’on donne de fumer.
Encore une fois : il ne répète pas pourquoi arrêter de fumer, il répète pourquoi on fume, jusqu’à ce que l’on accepte. La réponse est unique : parce que c’est une drogue. Il le dit dès le début. Il passe ensuite le reste du livre à répondre à toutes les autres réponses que l’on s’invente à “pourquoi je fume”.
Je ne vais pas résumer tout le livre alors je m’arrête sur cet exemple. On pense que la cigarette nous donne confiance. On a peur d’arrêter car c’est devenu une béquille. Mais c’est une illusion :
Les fumeurs ont du mal à admettre que la cigarette est responsable du sentiment d’insécurité qui les envahit lorsqu’ils n’ont plus de cigarettes et que le bureau de tabac va fermer. Les non-fumeurs ne connaissent pas cela ; c’est le tabac qui en est le seul responsable.
Cette illusion est le résultat de la drogue.
Quand on l’accepte, c’est plus simple d’arrêter. Car on comprend qu’on ne fait pas un sacrifice : le monstre dans l’estomac nous ment. Nous n’avons pas besoin de lui.
Voilà pourquoi il est si compliqué d’arrêter progressivement :
Bien loin de vous détourner de la cigarette, le fait de limiter votre consommation vous rend plus malheureux encore et vous convainc que la cigarette est une chose essentielle sans laquelle on ne peut être heureux. Il n’y a rien de plus pathétique qu’un fumeur qui essaie de diminuer sa consommation. Il a l’illusion que, moins il va fumer, moins il aura envie de fumer. En fait, c’est l’inverse. Moins il fume, plus il souffre du manque de nicotine
Critiques du livre
Après ma lecture, j’étais si enthousiaste que j’ai fait comme je fais toujours : j’ai été recoupé des sources et voire ce qu’on dit de la méthode.
Là j’ai été déçu. Je vois dans l’article wikipédia :
Pour certains médecins et chercheurs, l'efficacité de cette méthode demeure douteuse et controversée, malgré d'intenses campagnes promotionnelles. En effet, les services d'aide à l'arrêt au tabac du NHS ont commandé une synthèse au NICE sur les traitements non proposés par le NHS. La Méthode facile d'Allen Carr a donc été évaluée à l'instar d'autres méthodes comme l'acupuncture ou les méthodes aversives. Le rapport concluait qu'il n'y avait pas d'études contrôlées sur l'efficacité de la méthode de sevrage au tabac proposée par Allen Carr
Puis une critique encore plus violente d’un médecin français. Je décide alors de consulter la version anglaise de l’article, car il y a toujours plus de détails.
Surprise… il n’y a pas ce passage dans la version anglaise. Je retourne donc à la version française et regarde la source pour aller lire moi-même l’étude. Elle conclut que l’acupuncture ne fonctionne pas plus qu’un placebo. Mais elle dit qu’elle n’a pas assez de données pour rendre un avis sur la méthode d’Allen Carr.
Suffisant néanmoins pour jeter le doute.
J’allais donc t’écrire de prendre tes précautions. Que, même si je connais des gens sur qui ça a marché, qu’il faut tempérer l’enthousiasme si on ne peut pas mesurer les effets.
Puis, je me suis dit que la méthode était bien trop connue (le livre a été vendu 14 millions de fois) pour ne pas avoir été scrutée par d’autres études.
Et, je suis tombé sur d’autres études qui concluent bien à l’efficacité de la méthode.
Ouf. Je ne l’ai pas lu pour rien.
En revanche… ma critique est la même que tout le monde : c’est vraiment un livre répétitif. Ce n’est pas agréable à lire, j’ai failli abandonner au milieu.
Mais bon… c’est un moindre mal pour avoir une méthode efficace.
En tout cas, le sort est cruel puisque l’auteur a arrêté de fumer à 49 ans et est mort à 72 ans d’un cancer du poumon…
Mais il nous laisse une méthode qui, je trouve, donne vraiment espoir. Je ne fume pas mais j’ai vraiment l’impression qu’il a touché le bon levier.