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Ali Ziri est un retraité algérien de 69 ans. Il est de passage en France pour le mariage de son fils. Il est dans une voiture conduite par son ami Arezki Kerfali (61 ans).
Nous sommes le 9 juin 2009 et la police fait arrêter la voiture. Ils obtempèrent.
Le problème c’est qu’ils sont alcoolisés. La police procède dont à leur interpellation.
Nous n’avons pas de vidéo pour savoir à quel point ils ont résisté ou non pendant l’interpellation.
En tout cas, la version des policiers c’est qu’Ali Ziri est sur le siège arrière de la voiture de police. Mais il est agité, derrière. Pour le calmer, les policiers utilisent alors la technique du pliage.
C’est une technique très dangereuse. Au moment des faits les policiers en connaissent la dangerosité car, en 2003, elle a tué un homme sobre de 24 ans.
Ici elle est appliquée sur des hommes de plus de 60 ans, ivres. Pendant plusieurs minutes.
Combien ? Dure à dire : c’est une zone d’ombre. Puisqu’il n’y a aucun témoin autre que les policiers pour raconter le trajet jusqu’au commissariat.
En revanche, les caméras de vidéosurveillance du commissariat nous montrent que
Ali Ziri est littéralement expulsé du véhicule (…), il est dans un premier temps jeté au sol puis saisi par les quatre membres, la tête pendante, sans réaction apparente, et emmené dans cette position jusqu’à l’intérieur du commissariat.
Le tout, en étant toujours menotté. Idem pour Arezki Kerfali.
Ils vont alors rester allongés par terre pendant une heure quinze, dans leur vomi. Tous les policiers présents les voient.
Selon un témoignage, un policier va même poser son pied sur la tête d’Arezki en disant Tu vas essuyer puis en faisant bouger sa tête avec son pied, comme on ferait avec une serpillère.
Pendant tout ce temps personne ne porte assistance aux deux hommes et notamment à Ali.
Il faudra attendre une heure et demie après l’arrivée pour qu’il soit finalement transporté à l’hôpital. Il meurt, deux jours plus tard.
Le combat judiciaire
La famille va en justice.
3 ans plus tard (2012), comme souvent, le juge prononce un non-lieu. Alors que pourtant l’autopsie révèle bien qu’Ali Ziri est couvert d’hématomes et que c’est bien une asphyxie qui a conduit à son décès.
Et alors même que la CNDS (Commission nationale de déontologie de la sécurité) qui est la seule à avoir eu accès aux vidéosurveillances avait dénoncé un traitement inhumain et dégradant.
La CNDS c’est un organe indépendant créé par le gouvernement Jospin en 2000 et dissout en 2009 par Sarkozy qui s’occupait des recours à l’encontre des actions des “forces de l’ordre”.
Mais, voilà… dans les affaires de violences policières, on a souvent un non-lieu.
La famille ne lâche pas. Elle va en cassation. 2 ans plus tard (2014), semi-victoire : une Cour de Cassation prolonge le parcours. Mais… 2016… c’est fini. La justice française déclare définitivement le non-lieu.
Il n’y a plus de recours possible en France, c’est l’issue définitive.
Mais…
La Cour Européenne des Droits de l’Homme condamne la France
La famille ne lâche toujours pas. Elle porte l’affaire jusqu’à la CEDH.
Et… après 2 ans (en 2018), la CEDH déclare la France coupable.
La France est condamnée à verser 30 000€ pour le dommage moral.
La CEDH a estimé qu’il n’était pas possible de prouver avec certitude que c’est la technique du pliage qui a directement tué Ali Ziri. Elle estime également que la réaction des policiers est proportionnée à ce moment MAIS c’est la suite qui est épinglée par la CEDH : le fait de laisser un homme de cet âgé, en état d’ébriété, qui tient à peine debout, allongé autant de temps dans son vomi, les mains menottées, sans la moindre assistance médicale.
Les sources
J’ai eu connaissance de l’histoire en lisant : La domination policière de Mathieu Rigouste.
Puis j’ai été approfondir le descriptif des faits grâce à une trilogie d’articles de Mediapart. Le principal étant celui-ci (lecture réservée aux abonnés) :
https://www.mediapart.fr/journal/france/210618/la-cedh-condamne-la-france-pour-la-mort-d-ali-ziri/prolonger
Ali Ziri, 69 ans, tué par un policier
Merci pour ce travail 🙏
Merci de nous partager ces histoires