2,8 millions d'autistes en France
On sait une chose avec certitude : il y a beaucoup plus d’autistes que ce qu’on croyait.
La première estimation de la prévalence de l’autisme faisait état d’environ 1 enfant sur 2 222 en 1966. Ce chiffre n’a cessé d’augmenter au fil des décennies : 1 sur 667 en 1979, 1 sur 150 en 2000, 1 sur 59 en 2014, 1 sur 54 en 2016, et la dernière enquête de 2018 parle d’1 sur 44 ! D’autres recherches suggèrent même que ce chiffre pourrait être sous-estimé.1
En ce moment même, 1 enfant sur 31 reçoit un diagnostic d’autisme aux USA. Alors que l’an dernier c’était 1 sur 36.
En cherchant ce chiffre je suis tombé sur un tableau qui m’a donné envie d’insulter la France.
Donc la France est le pays “riche” qui diagnostique le moins d’enfants autistes ! Ou en tout cas dans la queue de peloton. Y’a plein de raisons à cela. On en reparlera, mais comme souvent tu peux déjà retenir que c’est en partie la faute de la psychanalyse.
En France on est plutôt autour de 0,6% de diagnostics alors qu’aux USA on est autour de 3,3% (donc 5,5 fois plus).
Certaines études estiment même que le taux est plus proche de 4%.
Je fais partie des personnes qui pensent que c’est sûr que le taux est plus proche de 4%. Mais prenons le chiffre prudent de 2,2% (qui est celui que je retrouve le plus souvent) : ça fait 1,5 millions d’autistes en France.
Quasiment la TOTALITÉ des autistes ignorent qu’iels sont autistes
Que tu choisisses le chiffre de 1,5 ou 2,8 millions (ou même celui de 700 000 qui est celui retenu par les autorités françaises), y’a un truc sur lequel personne ne débat : quasiment toutes les personnes autistes vivantes au moment où j’écris ignorent qu’elles sont autistes.
Parce que, comme je te disais, notre reconnaissance de l’autisme a explosé lors des dernières années. Mais ça veut dire qu’une personne née dans les années 60 n’avait quasiment aucune chance de recevoir un “diagnostic”2
Un chercheur, John Elder Robinson, s’est intéressé à la question. Il a cherché à estimer combien d’adultes autistes auraient été “diagnostiqué·es” si on avait les moyens d’aujourd’hui à leur enfance. Verdict :
L’interprétation des données par Robinson, le conduisent à suggérer qu’il y a entre 3 et 10% des autistes adultes qui ont un diagnostic3
Et, pour te donner une idée d’à quel point les choses ont évolué vite et que ce n’est pas réservé aux générations nées dans les années 60/70…
Hjördis Atladottir et ses collègues ont établi que les diagnostics d’autisme étaient quatre fois plus fréquents pour les personnes nées entre 1999 et 2001 comparées aux personnes nées entre 1989 et 1991.
En d’autres termes : j’appartiens moi aussi à une génération perdue de l’autisme alors que je vais sur mes 36 ans.
Il y a donc 2 certitudes en ce qui te concerne
La première certitude que j’ai c’est que tu connais des personnes autistes. Peu importe le chiffre qu’on retient entre 700 000 ou 2,8 millions : ça fait entre 1 personne sur 100 et 1 personne sur 25.
La deuxième certitude que j’ai c’est que tu connais au moins une personne autiste qui ne sait pas qu’elle est autiste.
Et c’est ça qui est terrible. Parce qu’une personne qui ne sait pas qu’elle est autiste va :
se sentir défaillante,
aura souvent un bien plus fort taux d’anxiété, de dépression et d’idées suicidaires,
et plein d’autres joyeusetés.
Un film de sensibilisation
Il y a moins de deux semaines la meilleure représentation cinématographique de cette problématique est sortie dans les salles.
Le film s’appelle Différente et je t’invite à aller le regarder. Pour une fois, pour la première fois, on a un film en France qui présente les difficultés d’une adulte autiste qui ne le sait pas (je ne te spoile rien c’est le pitch du film). Mais surtout pour la première fois on a un film en France qui présente fidèlement l’autisme tout court.
Parce que non, les autistes ne ressemblent ni à Sheldon, ni à Rain man.
Je suis quasiment sûr que si tu vas voir le film tu ressortiras avec un grand aaaaaaaaah en pensant à quelqu’un que tu connais.
Une formation ?
Y’a quelques mois j’ai sorti une formation qui est devenue, à ma grande surprise, un best-seller. Ça s’appelait : COMPRENDRE L'AUTISME : faire la paix avec ton rythme et tes besoins
Avec cette formation, j’ai créé un groupe WhatsApp pour partager les expériences, poser des questions, etc.
Et… je crois que ce groupe a apporté plus de valeur que la formation en elle-même.
Mais ça m’a aussi montré à quel point c’était dur de se débarrasser du validisme qui nous bourre de clichés sur l’autisme et nous empêche de nous reconnaître.
Je suis passé par là… quand j’ai lu pour la première fois la description de l’autisme dans le DSM, j’ai grincé des dents et j’ai pensé c’est pas moi…enfin un peu… mais non.
Depuis j’ai été lire encore plein d’autres livres pour trouver comment décrire l’autisme d’une manière si précise que la plupart des autistes s’y reconnaissent. Parce que c’est le grand souci : le film Différente va te montrer une version de l’autisme. Tout est fait pour que le personnage soit la plus large possible mais ça reste une version spécifique. Ne serait-ce que parce que c’est une femme blanche qui a la trentaine et qui vit en ville.
Tout ce que j’ai appris, je m’en suis servi pour décrire l’autisme autour de moi et constater à quel point beaucoup plus de gens s’y reconnaissaient.
J’ai désormais ce qu’il faut à la fois en connaissances théories et en expériences pratiques pour te proposer une formation qui serait l’étape d’avant la dernière.
Bah oui parce que la dernière fois je t’ai montré quoi faire une fois que tu sais que tu es autiste…
Cette fois je peux te montrer comment on voit avec précision qu’on est autiste. Un parcours pour cheminer toi-même et arriver à ta propre conclusion.
Mais je t’en parle demain.
Is This Autism?: A Guide for Clinicians and Everyone Else - Henderson, Donna; Wayland, Sarah; White, Jamell
Je mets des guillemets car l’autisme n’est pas une maladie donc on ne devrait pas dire le mot diagnostic
Is This Autism?: A Companion Guide for Diagnosing - Henderson, Donna; Wayland, Sarah; White, Jamell.